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La demande des consommateurs européens influence les investissements des entreprises dans la production de coton biologique en Éthiopie

15 juin 2014

À la fin mars 2014, Aycoom Agricultural Development Plc, une entreprise conjointe entre Ayka Addis Textile & Investment Group (actionnaire à 55 %) et Omo Valley Agricultural Development Plc (45 %), a annoncé le lancement d’un projet visant à développer 10 000 ha de production de coton biologique en Éthiopie. Le projet envisagé devrait coûter quelque 815 millions de birrs (soit environ 30,4 millions € au 4 juin 2014).

Le projet à grande échelle, appuyé par l’État, intervient à l’heure d’une demande croissante pour du coton biologique sur le marché européen et d’un processus « complexe et coûteux » de certification des producteurs de coton à petite échelle. Actuellement, Ayka Addis Textile & Investment Group doit importer du coton biologique – ce qui a coûté à l’entreprise 72,5 millions de birrs (environ 2,7 millions €) en 2013. Le nouveau projet permettra au groupe Ayka de devenir un producteur intégré « de bout en bout » de produits textiles en coton biologique.

S’exprimant sur les développements de l’entreprise, Yared Mesfin, directeur du marketing pour le coton et le textile à l’Institut éthiopien du développement de l’industrie du textile, a fait observer que les vêtements fabriqués à partir de coton biologique faisaient l’objet d’une demande plus importante sur les marchés mondiaux et recevaient donc un meilleur prix. La tendance à la hausse est confirmée par le rapport sur le marché du coton biologique de 2012 de Textile Exchange, qui met en lumière l’engagement croissant des détaillants dans le coton biologique et l’approvisionnement durable de fibres, dans le contexte de volumes de production plutôt stables de fibre de coton biologique. Toutefois, le rapport de Textile Exchange souligne également que les utilisateurs finaux sont soucieux d’autres considérations socio-économiques et environnementales (par ex. le commerce équitable et la durabilité au sens large) qui vont au-delà des formes de production agricole simplement biologiques et qui informent également les décisions d’approvisionnement.

L’analyse de la presse suggère qu’une nouvelle tendance se dessine, à savoir que des grandes entreprises de textile investissent dans la culture de coton en Éthiopie afin de garantir leurs approvisionnements. D’après l’Association des producteurs, égreneurs et exportateurs de coton éthiopiens, 55 000 ha étaient consacrés à la culture de coton en 2012/13, avec 35 000 tonnes de coton récoltées. Vingt mille tonnes supplémentaires de coton ont été importées. 

Commentaire éditorial

Le marché du coton biologique est dans une situation paradoxale. Alors que la demande en coton biologique est en hausse – plusieurs grandes entreprises mondiales comme H&M, Nike, Puma et Inditex affichant leur volonté de développer la part du coton biologique dans leurs produits – la production de coton biologique chute depuis 2011, après 10 ans de croissance. À des éléments conjoncturels, comme la sécheresse, s’ajoutent des éléments plus structurels tels que le manque de semences certifiées et d’encadrement, la contamination par le coton OGM, et surtout des cotonculteurs dont la situation économique ne s’améliore pas, voire se détériore.

Premier détaillant utilisateur de coton biologique en 2012 (selon le rapport 2012 de Textile Exchange), avec 39 % de ses produits en coton bio en 2013, C&A s’est alarmé début avril de cette situation, l’estimant critique, avec des menaces pesant sur les investissements à long terme.

Si les marques et les détaillants peuvent vendre plus chers leurs produits, les bénéfices ne semblent pas être partagés avec les petits producteurs. Faiblement intégrés à la chaîne de valeur, ils ne parviennent souvent pas à bénéficier de la prime, vendant leur coton biologique au prix du coton conventionnel, alors même que les rendements sont plus faibles. Pour le coton bio, les producteurs ne peuvent accéder à ce marché que s’ils sont certifiés, mais il n’y a aucune garantie qu’ils soient effectivement en mesure de vendre leur coton bio, d’une part, et qu’ils reçoivent une prime par rapport au coton conventionnel, d’autre part. La difficulté de vendre leur coton bio avec une prime est une des raisons de la baisse des superficies en coton bio. De plus, si une prime est effectivement versée, il n’est pas certain qu’elle couvre des rendements moindres et le coût de la certification. Le coton bio, comme celui conventionnel, est vulnérable aux fluctuations de l’offre et de la demande, et les producteurs subissent la volatilité des prix. Accéder à la chaîne d’approvisionnement et sécuriser des contrats d’achat à moyen terme avec les marques et les détaillants semblent être des conditions indispensables pour garantir une production et des revenus aux producteurs.

Si la production de coton bio recule, ainsi que celle de coton Fairtrade – la seule initiative à garantir un prix minimum et une prime au producteur –, l’initiative Better Cotton Initiative (BCI), rencontre un vif succès. En 2013, plus de 800 000 tonnes de coton certifié BCI ont été produites contre 140 000 tonnes pour le coton bio en 2011/12. Avec des critères moins exigeants, BCI implique tous les acteurs de la filière coton pour rendre le processus de production « plus durable et plus responsable ». L’Inde, qui était devenue le premier producteur mondial de coton biologique, a vu sa production décliner de près de 50 % en 2010/11, pour ensuite se stabiliser à ce niveau. Elle se tournerait vers le coton BCI, moins coûteux, moins contraignant et qui n’exclut pas les OGM.

Ce sont là des considérations pertinentes pour les pays africains producteurs de coton – la grande question étant la nécessité de répondre à la demande mondiale croissante de coton biologique tout en veillant à ce que les petits producteurs soient correctement rémunérés, afin qu’ils ne soient pas marginalisés au sein des chaînes d’approvisionnement de coton biologique.

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