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Le Bénin profite de la politique commerciale agricole du Nigeria

01 juin 2014

Un examen de la situation agricole au Bénin réalisé par l’USDA, publié en mars 2014, affirme que le « Bénin sert de corridor de transport pour l’Afrique de l’Ouest, desservant plus de 100 millions de personnes dans les pays enclavés tels que le Niger, le Mali, le Burkina Faso, le Tchad et les États du nord du Nigeria ». L’USDA note que « les services portuaires relativement efficaces et les politiques commerciales du Bénin font de lui un rouage essentiel du commerce régional vers les pays voisins ». Le rapport relève des améliorations dans les opérations portuaires du pays ainsi que certaines petites améliorations dans la facilité de faire des affaires sur ces trois dernières années. Le Bénin applique le tarif extérieur commun (TEC) de l’UEMOA, avec quatre bandes tarifaires (zéro, 5 %, 10 % et 20 %) sans aucune restriction quantitative.

L’examen indique que « le commerce informel entre le Nigeria et le Bénin est substantiel ». Les principaux produits impliqués dans ce commerce informel sont le riz, les produits de la volaille, le sucre raffiné et toute une série d’autres produits alimentaires et agricoles. Le rapport relaie les estimations de sources commerciales selon lesquelles « plus de 85 pour cent de ces types de produits expédiés au Bénin sont destinés à la revente au Nigeria via des activités de commerce informel transfrontalier ». Ce commerce pose des problèmes particuliers dans les secteurs de la volaille et du riz.

Le Bénin a un secteur de la viande de volaille très restreint (13 000 tonnes), la production étant à présent largement axée sur les œufs. Cependant, le Bénin est un « grand importateur de viande de volaille », les importations avoisinant les 160 000 tonnes (environ 6 500 conteneurs de 40 pieds), pour un montant de 450 millions $US (même si certains négociants suggèrent que ce chiffre pourrait atteindre pas moins de 300 000 tonnes). Le commerce informel vers les marchés nigérians procure des bénéfices très importants aux négociants béninois, plusieurs importateurs de poisson abandonnant l’utilisation de leurs installations frigorifiques au profit de l’importation de volaille et élargissant même leur capacité de stockage frigorifique pour les importations de volaille.

Ce commerce semble être mu par « l’interdiction d’importations légales de volaille congelée » imposée par le gouvernement du Nigeria, une mesure visant à protéger les producteurs de volaille locaux nigérians.

Les producteurs de volaille du Bénin souhaitent pour leur part que le gouvernement nigérian « retire son interdiction d’importation sur la viande de volaille afin qu’ils aient un libre accès à l’énorme marché du Nigeria ». Il semble que cela encouragerait l’investissement dans la production de volaille pour les marchés d’exportation et national.

Dans le secteur du riz, d’après l’examen de l’USDA, les négociants du Bénin peuvent vendre un sac de riz de 50 kg au Nigeria à des prix supérieurs de 75 % à ce qu’ils peuvent obtenir du côté béninois de la frontière. D’après l’USDA, afin d’éviter des taxes nigérianes élevées, les négociants nigérians avaient pour habitude de rediriger leurs lots de riz vers des ports dans les pays voisins, « où ils sont dédouanés et renvoyés vers le marché nigérian via des activités de commerce informel ». D’après la presse, le contrôleur général des douanes au Nigeria a « identifié le faible droit de douane dans les pays voisins comme étant l’un des principaux facteurs contribuant à la contrebande de riz dans le pays ».

La dynamique commerciale le long de la frontière Bénin-Nigeria doit être envisagée dans le contexte de l’introduction du TEC de la CEDEAO prévue pour le 1er janvier 2015, une initiative qui devrait mettre fin à la réexportation. Le directeur général de la Chambre de commerce et d’industrie de Lagos a souligné que l’introduction du TEC devra inclure l’abolition des listes d’interdiction des importations et exportations, « l’abrogation des exemptions aux droits de douane, l’abrogation des taxes à l’importation et la perte de l’autorité souveraine sur la politique tarifaire ». 

Commentaire éditorial

La situation commerciale entre le Bénin et le Nigeria met en lumière les défis rencontrés dans la mise en œuvre du TEC de la CEDEAO et la nécessité d’une harmonisation politique plus générale, si l’on veut supprimer l’incitatif économique au commerce informel à grande échelle, qui a un impact direct sur les décisions d’investissement du secteur formel.

Bien que cela soit une question interne devant être résolue au sein de la CEDEAO, il existe une dimension extérieure de l’UE, les exportations européennes de morceaux de volaille étant redirigées vers ce commerce de réexportation (voir article Agritrade «  Une croissance ininterrompue des exportations de viande de volaille de l... », 24 novembre 2013, et «  Croissance continue des exportations de viande de volaille de l’UE cibla... », 3 mars 2014) et présentant ainsi des menaces sérieuses pour la santé des consommateurs à la fin de la chaîne. (La contrebande sape complètement l’intégrité de la chaîne du froid, les produits étant ultérieurement recongelés dès livraison au Nigeria).

Dans le secteur du riz, les derniers développements au Nigeria suggèrent qu’il est nécessaire de réduire sensiblement l’écart entre les droits de douane appliqués au Nigeria et dans les pays ouest-africains si l’on veut contrer le problème de la contrebande, qui compromet la mise en œuvre de la politique nationale (voir article Agritrade «  Hésitations vis-à-vis de la politique commerciale du Nigeria sur le riz », 18 mai 2014). Il s’agit là aussi d’une question capitale pour la crédibilité du TEC de la CEDEAO, qui serait minée par l’usage continu et répandu de mesures non tarifaires parallèlement au TEC.

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