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Exportations agroalimentaires des pays ACP : l’importance croissante des MNT et des mécanismes de règlement des différends SPS

25 mai 2014

Introduction

Un livre électronique publié par l’OCDE en janvier 2013, intitulé « Non-tariff measures in agri-food trade: Improving policy coherence for development » (Les mesures non tarifaires dans le commerce agroalimentaire : améliorer la cohérence des politiques en faveur du développement), notait qu’avec le démantèlement des barrières tarifaires classiques les mesures non tarifaires (MNT) ont gagné en importance1. Il soulignait le fait que les MNT sont de plus en plus introduites en réponse aux préoccupations concernant l’environnement (sous la forme d’une certification de la durabilité), la sécurité des denrées alimentaires, le bien-être animal et les questions sanitaires et phytosanitaires (SPS). D’après une analyse de l’OCDE, « l’impact des MNT en termes de coûts commerciaux est plus important que les droits de douane en vigueur s’agissant des entraves aux échanges commerciaux ». La publication affirmait que « la plupart des MNT sont mises en place pour s’assurer que les produits importés se conforment aux mêmes normes et règlements que les produits nationaux » et sont considérées comme des « actions correctives » lorsque les marchés échouent ou produisent des résultats socialement inefficaces, mais appelait également à une analyse des coûts/avantages des MNT. Les études de cas citées dans le livre électronique suggèrent que, dans certains pays, des normes plus strictes ont forcé une transition d’une production basée sur les petits exploitants vers une production reposant sur les fermes commerciales pour l’exportation.

Une autre publication de la CNUCED, « Non-tariff measures to trade: Economic and policy issues for developing countries »2 (Mesures non tarifaires : questions économiques et politiques pour les pays en développement), publiée en août 2013, soulignait la grande diversité des MNT, qui vont des instruments de politique commerciale (par ex. les quotas, les subventions, les mesures de défense commerciale et les restrictions à l’exportation) aux instruments pour la poursuite d’objectifs politiques non commerciaux (par ex. les mesures techniques liées à la sécurité des denrées alimentaires, les contrôles SPS et les objectifs environnementaux). Le rapport faisait valoir que, bien que cela puisse être involontaire, les « effets restrictifs et de distorsion des mesures non tarifaires peuvent systématiquement défavoriser (…) les pays en développement et encore plus les pays moins avancés à faible revenu ». Plus particulièrement, l’analyse de la CNUCED affirmait que « les MNT peuvent avoir des effets assez divers, en fonction non seulement de leur type et de leur portée, mais également du cadre économique dans lequel elles sont appliquées », ajoutant que l’impact réel était également dépendant des « procédures de mise en œuvre et des mécanismes d’administration » utilisés.

Les discussions à l’OMC à la fin octobre 2013 ont suggéré que la rationalisation des procédures de mise en œuvre pourrait réduire les coûts d’accès au marché dus aux MNT de pas moins de 80 %.

C’est dans ce contexte que l’analyse de la CNUCED considérait qu’il est nécessaire d’améliorer la transparence de l’application des MNT afin de réduire les obstacles au commerce et également les coûts de négociation.

Implications

Les MNT deviennent un sujet de plus en plus important pour les pays ACP et peuvent maintenant être considérées comme le principal obstacle aux exportations du secteur agroalimentaire du Groupe ACP. En 2012/13, l’UE a introduit des changements à toute une série de contrôles SPS et de sécurité des denrées alimentaires. Cela a augmenté les coûts de l’approvisionnement des marchés de l’UE, et soulevé quelques questions concernant la justification scientifique des nouveaux contrôles.

Dans le cas des exportations d’agrumes d’Afrique du Sud, la réduction du niveau de tolérance dans l’UE pour les interceptions de la maladie des taches noires des agrumes a exigé que l’industrie des agrumes de la région d’Afrique australe introduise des mesures et contrôles supplémentaires pour un coût total estimé entre 500 millions et 1 milliard de rands (sous la forme de pulvérisations supplémentaires, de stockage et autres mesures de contrôle, ainsi que de pertes dues à l’exportation vers des marchés alternatifs). Malgré ces mesures, le 28 octobre 2013, l’UE a introduit une interdiction sur les importations d’agrumes en provenance d’Afrique du Sud, avec la possibilité de prolonger l’interdiction au cours de la prochaine saison. L’interdiction de l’UE semblait également ne pas tenir compte d’un rapport émanant d’un groupe international de scientifiques du secteur des agrumes, qui a affirmé qu’« il n’a jamais été démontré que les agrumes pouvaient être un vecteur d’entrée, d’installation et de propagation de la maladie des taches noires des agrumes »3.

L’UE a en outre augmenté unilatéralement la fréquence et la durée des inspections, avec pour effet, dans certains secteurs, de réduire la valeur commerciale des produits agroalimentaires ACP4.

Ensemble, ces initiatives menacent de perturber la structure actuelle des exportations du secteur agroalimentaire ACP, le fardeau pesant lourdement sur les petits producteurs qui tentent de rejoindre les chaînes d’exportation à valeur élevée.

Des questions se posent

Bien que les associations des exportateurs ACP affectés et les gouvernements nationaux se soient tous plaints et aient réclamé des consultations bilatérales pour résoudre les problèmes SPS et de sécurité des denrées alimentaires spécifiques5, à ce jour, peu d’avancées ont été réalisées, en partie en raison de l’absence :

  • de structures clairement définies pour l’échange d’informations sur les changements prévus ;
  • de structures de consultation efficaces sur la justification scientifique de ces changements ;
  • de mécanismes d’arbitrage exécutoires pour les différends commerciaux liés aux questions SPS et de sécurité des denrées alimentaires.

La mise en place de structures d’information et de consultation ainsi que de mécanismes d’arbitrage exécutoires de cette nature est un domaine où des initiatives ACP collectives gagneraient à être lancées, aussi bien dans le dialogue avec l’UE qu’avec d’autres, à l’OMC.

En effet, en 2013, le Secrétariat du Commonwealth a publié un rapport du lauréat du prix Nobel, l’économiste Joseph Stiglitz, et d’Andrew Charlton, dans lequel ils ont passé en revue les lacunes du processus de l’OMC et ont proposé la création d’un « droit au commerce »6. Leur proposition reconnaît qu’il existe de nombreux aspects des politiques des pays développés qui limitent la capacité des pays en développement à participer au commerce international, et que ces mesures politiques sont particulièrement lourdes pour le secteur agroalimentaire. Les dispositions relatives au « droit au commerce » ont pour objectif de fournir un cadre permettant d’aborder ce problème. Bien que cette proposition soit très controversée à l’OMC, elle souligne les possibilités d’intensifier le dialogue politique ACP-UE sur la conception et l’application des MNT.

En octobre 2013, le gouvernement canadien a publié une note de synthèse sur l’accord Canada-UE, faisant observer qu’il inclut des dispositions traitant des mesures SPS et du règlement des différends qui rendent les dispositions SPS « sujettes au règlement des différends »7. Cela pourrait offrir des précédents importants pour le développement ultérieur du dialogue politique ACP-UE visant des accords de règlement des différends SPS exécutoires. Ces accords sont également susceptibles d’être un point à l’ordre du jour des négociations du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP) entre les États-Unis et l’UE8.

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