CTA
Petite police
Polic moyenne
Grande police
English |
Passer à l'anglais
Français
Passer au français
Filtrer par Questions agricoles
Produits de base
Régions
Type de publication
Filtrer par date

Appels grandissants à la révision de la politique de l’UE en matière de biocarburants

18 novembre 2012

Dans une déclaration conjointe du 4 septembre 2012, les responsables de la FAO, du FIDA et du PAM ont appelé à une révision et à un ajustement des « politiques en vigueur encourageant d'autres utilisations des céréales » (par ex. certains aspects des mandats des biocarburants), conformément aux recommandations faites au Sommet du G20 de 2011 à Paris. Cette déclaration est intervenue dans un contexte de hausse des prix internationaux des denrées alimentaires.

Le 12 septembre, un porte-parole du gouvernement français a appelé à « une pause dans le développement des biocarburants faisant concurrence avec l’alimentation ». Il a été rapporté dans la presse que le gouvernement français a pris la décision de plafonner l’utilisation des biocarburants basés sur des cultures agricoles à 7 %, soit le niveau actuel.

Les dirigeants des entreprises du secteur privé ont également appelé à une révision des politiques en matière de biocarburants. Paul Bulcke, directeur général de Nestlé, s’est fermement opposé à la production de carburant à partir des cultures agricoles, affirmant que, si cela « partait d’une bonne intention à l’époque », il s’agissait maintenant d’une « aberration », et que « l’UE et les États-Unis devaient investir dans les bons biocarburants ». Nestlé a déployé des activités de lobbying auprès des autorités européennes et américaines pour que celles-ci réexaminent les objectifs des biocarburants.

Les appels à une pause dans le développement des biocarburants sont conformes aux décisions de la CE d’« imposer une limite pour l’utilisation des biocarburants basés sur des cultures agricoles », puisqu’ils sont « moins respectueux du climat que ce que l’on imaginait au départ et font concurrence à la production alimentaire ». D’après des informations publiées sur le site d’actualités et de débats de l’UE Euractiv.com, les propositions de la CE « représentent une transition majeure de la politique très controversée de l’Europe en matière de biocarburants et l’admission tacite (…) que l’objectif 2020 de l’UE en matière de biocarburants était voué à l’échec dès le début ». Le projet de proposition, contenu dans un rapport CE sur le changement de l’utilisation des terres en raison des politiques de l’UE en matière de biocarburants (qui a également défini de nouveaux objectifs de réduction des émissions pour les céréales, le sucre et les oléagineux), appelle à mettre fin « à toutes les subventions publiques pour les biocarburants basés sur des cultures alimentaires », après 2020, lorsque la législation actuelle ne sera plus en vigueur. Au titre de ces propositions, les subventions ne seront fournies que si elles engendrent « des économies de gaz à effet de serre substantielles (…) et si les biocarburants ne sont pas produits à partir de cultures utilisées pour l’alimentation humaine et animale ». En outre, « l’utilisation de biocarburants produits à partir de cultures telles que le colza et le blé serait limitée à 5 % de la consommation totale d’énergie dans le secteur du transport européen en 2020 ». La CE souhaite également « augmenter la part des biocarburants sophistiqués n’utilisant pas de terres et produits à partir de déchets ménagers et d’algues ».

Les propositions de la CE suscitent des craintes parmi les producteurs européens de biocarburants, tandis que les représentants de l’industrie rejettent les accusations selon lesquelles les politiques en matière de biocarburants sont responsables de la hausse actuelle des prix alimentaires. La spéculation, le gaspillage alimentaire et les demandes croissantes sur les marchés émergents sont considérés par les commentateurs de la presse et du marché comme des facteurs aggravant les effets de la sécheresse américaine. Les représentants de l’industrie des biocarburants affirment que « les prix élevés encouragent les agriculteurs à être plus productifs » et que le marché des biocarburants « réduit les déchets de l’agriculture en transformant les résidus végétaux en carburant ». Les ONG de développement ont été jugées responsables de la mauvaise presse donnée à l’industrie des biocarburants.

Les auteurs d’un rapport sur l’utilisation des biocarburants, publié par l’Institut pour la politique européenne environnementale (IEEP) en juin 2012, reconnaissent que « les biocarburants à eux seuls n’engendreront pas des prix plus élevés », mais qu’« il est clair qu’il y a un impact ». Le rapport préconise un recentrage des politiques de l’UE sur « l’amélioration de l’efficacité automobile, les véhicules électriques et les biocarburants produits à partir de déchets ». 

Commentaire éditorial

Les propositions de la CE visant à réviser le mandat des biocarburants auront peu d’effets à court terme sur les prix élevés des denrées alimentaires, puisque les changements politiques ne seront pas introduits avant 2020, à savoir l’échéance des engagements politiques actuels. À plus long terme, cependant, les propositions de la CE pourraient avoir de nombreuses implications pour les pays ACP.

Les objectifs élargis en matière de biocarburants ont été l’un des nombreux facteurs orientant la demande de céréales et de cultures oléagineuses. Réduire les objectifs actuels pour l’utilisation de biocarburants bénéficierait aux consommateurs dans les pays importateurs nets de denrées alimentaires. Toutefois, cela pourrait également exercer une pression baissière sur les prix payés aux producteurs dans des marchés déjà volatils pour les cultures produites par les ACP, telles que l’huile de palme et le sucre.

D’après le rapport de l’IEEP, les effets les plus probables sur les prix se feront sentir sur les « oléagineux et les huiles végétales raffinées pour le biodiesel ». Le rapport prévoit que les politiques actuelles en matière de biocarburants contribueront jusqu’en 2012 à :

  • une augmentation des prix des oléagineux de 8 à 20 % ;
  • une augmentation des prix des huiles végétales de 5 à 36 % ;
  • une augmentation des prix de la canne à sucre et de la betterave de 1 à 21 %.

En fonction de l’ampleur des changements introduits par toute révision des politiques européennes et américaines en matière de biocarburants, les prix du sucre, des cultures végétales et des cultures oléagineuses pourraient être réduits dans une certaine mesure. Les effets généraux, cependant, dépendront des tendances plus générales de la demande, de la transparence du marché et de la mesure dans laquelle on laissera le champ libre à la spéculation dans les marchés des denrées agricoles, à l’heure d’une extrême volatilité des prix. 

Commenter

Termes et conditions