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Lettre d’information pêche – octobre 2014

01 janvier 1970

Développements récents dans le marché européen du thon en conserve

06 septembre 2014

Deux publications récentes, à savoir le rapport Globefish de la FFA et le Trade and Industry News, dans son article spécial sur la conférence sur le thon Infofish de 2014, offrent un aperçu des développements intervenus dans le marché européen du thon en conserve, qui s’est développé en 2013 grâce à la hausse de la demande. De nouveaux produits du poisson plus adaptés, ainsi que certains poissons provenant de sources durables, ont été activement promus par les distributeurs européens. Par exemple, l’engagement des principaux distributeurs européens à n’utiliser que du thon capturé par des canneurs et non par des dispositifs de concentration des poissons – et donc produits plus durablement – a engendré une augmentation de la demande.

La demande de thon en conserve dans tous les grands marchés de l’UE a augmenté en 2013, notamment les importations françaises en provenance des Seychelles (+13 %), les importations allemandes en provenance d’Équateur (+53 %) et les importations britanniques en provenance de Thaïlande (53,8 %). La demande européenne a été satisfaite par la production de thon en conserve de l’UE (environ 166 000 tonnes), ainsi que les importations (534 564 tonnes). L’Espagne reste le plus gros producteur européen de thon en conserve (68 %), suivi par l’Italie (20 %). Le thon ayant subi une transformation primaire, importé pour mise en conserve, a également pris une place plus importante dans les pays européens où l'activité de transformation du thon est présente de manière traditionnelle, tels que l’Italie ou l’Espagne ; la Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG) a vendu près de 32 % de plus de longes de thon précuites vers l’Espagne en 2013 qu’en 2012. Toutefois, l’Équateur reste le plus gros exportateur vers l’UE, avec environ 88 000 tonnes.

Le principal partenaire européen pour le secteur de la transformation du thon équatorien est l’Espagne. Après une réunion avec l’ambassadeur équatorien en juin, le Secrétaire général de l’association espagnole des importateurs et conserveries a souligné que les investissements consentis dans le secteur du thon galicien génèraient plus de 5 000 emplois en Équateur. Mais la situation pour le commerce du thon entre l’UE et l’Équateur n’est pas claire. Le Système de préférences généralisées (SPG+) doit normalement prendre fin en décembre 2014, et les négociations pour un accord de libre-échange (ALE) UE-Équateur viennent à peine de s’achever. Un article dans l’accord mentionne que « les modalités commerciales négociées entre les deux parties entreront en vigueur lors du deuxième semestre de 2016 ». Si aucune solution n’est trouvée entre-temps, il est possible qu’il y ait une période pendant laquelle  les droits d’importation de l’UE sur le poisson équatorien vont augmenter.

Les exportations thaïlandaises vers les principaux marchés en Europe ont également augmenté, notamment vers le Royaume-Uni (+140,8 %), la France (+43,7 %) et les Pays-Bas (+42,6 %), malgré la suspension des négociations sur l’ALE UE-Thaïlande en raison de la situation politique.

D’autres grands fournisseurs de l’UE – les Philippines et la PNG – ont reçu un avertissement en juin dernier parce qu’elles ne prenaient pas suffisamment de mesures pour combattre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN). Toutes deux risquent d’être identifiées comme des « pays non-coopératifs » dans la lutte contre la pêche INN. Ceci intervient à un moment où les Philippines espèrent bénéficier du système SPG+, qui permettrait au pays d’exporter son thon en franchise de droits. À moins que des mesures soient prises pour rectifier la situation dans les 6 prochains mois, les exportations de poisson des deux pays pourraient se heurter à une interdiction d’importation imposée par l’UE. 

Commentaire éditorial

Le poisson provenant de sources durables – en particulier les produits portant un label écologique – est de plus en plus demandé par les distributeurs européens. À l’inverse, le règlement de l’UE en matière de pêche INN est devenu une exigence clé qui se doit d’être respectée par les pays et producteurs ACP. Dans le cadre de la politique commune de pêche (PCP) réformée, des exigences supplémentaires seront bientôt appliquées pour l’étiquetage du poisson, rendant obligatoire la mention de la « méthode de capture » des espèces sauvages. Le respect de cet ensemble d’exigences de plus en plus complexes exige des investissements conséquents par les gouvernements ACP et les producteurs de poissons pour garantir la légalité et la durabilité des pratiques de pêche, ainsi que la traçabilité « du filet à l’assiette ». Dans ce contexte, il parait nécessaire de trouver des moyens de rationaliser les exigences en matière de traçabilité – tel que requis par la réglementation sur la pêche INN, sur les normes sanitaires et phytosanitaires (SPS) et la nouvelle réglementation en matière d’étiquetage. Idéalement, un document unique devrait contenir toutes les informations nécessaires attestant que le produit provient d’un navire/établissement agréé, qu’il a été capturé légalement, et précisant l’engin de pêche. Il convient également de noter que les produits de l’aquaculture ne sont pas couverts par la réglementation de l’UE en matière de pêche INN ni par la nouvelle exigence en matière d’étiquetage des engins de pêche.

Des améliorations doivent être apportées à la réglementation de l’UE en matière de pêche INN, affirme une nouvelle étude

07 septembre 2014

Une nouvelle étude intitulée « Traceability, Legal Provenance and the EU IUU Regulation » (Traçabilité, provenance licite et règlement de l’UE en matière de pêche INN), soutenue par le Stop Illegal Fishing Program et récemment rendue publique, note qu’à ce jour aucune donnée n’a été publiée suggérant une réduction des volumes de poissons provenant de la pêche INN entrant sur le marché européen du fait de la mise en œuvre de la réglementation INN de l’UE. L’étude souligne également quelques lacunes de la réglementation ; par exemple, l’application du règlement se base sur des copies de documents au format papier, qui peuvent sérieusement compromettre la sécurité et la traçabilité des documents. Bien que les capacités de contrôle aient été améliorées, dans de nombreux cas, les autorités des pays tiers ne disposent pas de tous les éléments pour vérifier, en particulier en mer, que les produits de la pêche couverts par un certificat de capture ne proviennent pas de sources illégales ; et l’UE ne dispose pas actuellement de la capacité de contre-vérifier l’authenticité des certificats. À ce stade, l’étude souligne que ce sont simplement des certificats d’exportation, et non des certificats de capture licite.

Les auteurs suggèrent que jusqu’à ce que ces lacunes critiques dans le système de certification des captures soient effectivement traitées, les propositions visant à répliquer le règlement de l’UE en matière de pêche INN dans d’autres pays sont prématurées. Ils notent que si l’UE peaufine le règlement et peut prouver son efficacité, il peut potentiellement devenir un modèle et outil très précieux pour un système de traçabilité mondial garantissant la provenance légale des captures.

La stratégie propose la voie à suivre, et examine pour ce faire deux stratégies. La première part du principe que la réglementation INN de l’UE continuera à être le principal instrument déterminant la provenance licite du poisson. Par conséquent, aborder les principales faiblesses (par ex. en gérant les certificats de capture par un système électronique) serait la mesure immédiate la plus appropriée pour réduire la pêche INN. La seconde stratégie propose de comparer les différents systèmes existants par rapport à cinq critères fonctionnels, afin d’identifier les domaines où les améliorations sont les plus nécessaires. Ces cinq critères sont :

  • un contrôle efficace de la gestion des pêcheries ;
  • la délivrance de certificats pour le poisson provenant de sources licites ;
  • le maintien de l’intégrité de la quantité certifiée de poisson ;
  • le maintien de l’intégrité du poisson certifié pendant la phase de transformation ; et
  • la transparence des processus.

Commentaire éditorial

La capacité à commencer à contrôler la légalité des captures en mer est un des principaux défis pour les pays ACP, afin d’assurer que la mise en œuvre de la réglementation INN de l’UE mène à une réduction de la pêche INN (garantissant ainsi que les investissements consentis pour se conformer à la réglementation profitent à leurs pêcheries). Des efforts considérables ont déjà été consentis par les pays ACP pour renforcer leurs moyens de suivi, contrôle et surveillance et pour adapter leur législation, y compris via le dialogue et le soutien avec l’UE. Cependant, dans de nombreux cas, les certificats sont toujours – comme le montre l’étude – de « simples certificats d’exportation » et en aucun cas une garantie de la provenance légale du poisson. Des moyens supplémentaires doivent être mobilisés (par ex. via les projets régionaux) et la volonté politique doit être renforcée pour que la situation s’améliore véritablement. L’autre grand défi consiste à assurer que les informations sur la légalité du poisson sont transmises, sans altération aucune, tout le long de la chaîne de valeurs. La gestion des certificats de capture via un système électronique sera une étape cruciale pour relever les défis liés à la mise en œuvre de ce règlement.

Lutter contre la pêche INN par le biais de la politique commerciale : l’expérience de l’UE

07 septembre 2014

La Commission européenne (DG Mare) a récemment publié un aperçu de l’état d’avancement de la mise en œuvre du règlement INN de l’UE par les États membres, la Commission européenne et les pays tiers. Le document comprend un chapitre sur la cohérence entre la réglementation de la pêche INN et plusieurs autres politiques de l'UE (y compris la politique de développement et la politique de sécurité sanitaire et de santé), une première analyse de son impact sur les flux commerciaux et également sur la compatibilité de la réglementation INN avec les règles de l'OMC.

Au sujet de la cohérence des politiques pour le développement (CPD), généralement, la mise en œuvre du règlement est perçue comme ayant des impacts positifs sur le développement durable. Toutefois, des difficultés sont apparues pour les pays en développement pour respecter le système de certificat de capture, soulignant les défis en matière de systèmes de suivi, surveillance et contrôle (SCS) efficaces. Pour résoudre ces problèmes, une assistance technique a été fournie par l'UE aux pays en développement. Le rapport note que cette aide « n'est pas limitée aux pays qui ont signé des APP ».

En termes de cohérence avec la politique de sécurité sanitaire et de santé, l'étude souligne que, dans la pratique, plutôt qu'avoir deux régimes de déclaration, globalement similaires, pour une seule expédition de poissons, "la question se pose de savoir si les procédures de déclaration pourraient être d’une manière ou d’une autre combinées. »

Quant à l'impact de la mise en œuvre du règlement INN sur le commerce, le rapport souligne que la perception est que la réglementation de la pêche INN a déjà commencé à changer les pratiques des opérateurs INN: « le plus notable est la réduction du nombre de cargos frigorifiques tentant d'importer des produits de la pêche à Las Palmas ». 

Le document souligne d’ailleurs que le règlement INN soulève potentiellement une série de problèmes en termes de compatibilité avec les règles de l’OMC, notamment « la mesure dans laquelle le système de certification des captures, les éventuelles interdictions d’importation et les dispositions sur l’accès aux ports peuvent être considérés comme des obstacles techniques au commerce ». Cependant, l’étude note qu’il n’y a pas de différence de traitement entre l’UE et les pays tiers, et que le règlement INN est également conforme aux mesures prises au niveau international : « Par conséquent, bien que la possibilité d’une contestation à l’OMC ne soit pas à exclure, le règlement en lui-même est actuellement jugé conforme aux règles de l’OMC ».

Cette dernière question a également été soulignée dans un récent article de l'ICTSD, sur les mesures de marché et commerciales prises pour lutter contre la pêche INN. L'article souligne que « de nombreux pays pêcheurs et exportateurs [...] craignent que ces régimes deviennent des obstacles inutiles au commerce », soulignant la demande de la résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies 2013 sur la pêche durable à la FAO d'élaborer des lignes directrices et les critères applicables pour les systèmes de certificats de capture. Lors de sa session de juin 2014, la Comité des Pêches de la FAO (COFI), a en outre demandé que ces lignes directrices ne créent pas d'obstacles inutiles au commerce, et qu'elles respectent le principe d'équivalence, soient basées sur le risque, soient fiables, simples, transparentes et électroniques si possible. Les pays visent l'adoption des directives sur les certificats de capture à la prochaine session du COFI.

Commentaire éditorial

L'étude souligne que, en général, et compte tenu du fait que la réglementation sur la pêche INN a seulement été mise en place il y a moins de 4 ans, les changements sont déjà observés : malgré les défis – en particulier le système de certification des captures – les efforts des pays en développement, pour améliorer le SCS et décourager la pêche INN ont été stimulés par la mise en œuvre de la réglementation INN de l'UE. Il faut noter que l'importance pour la FAO d'élaborer des lignes directrices et des critères ‘fiables, simples, transparents et électroniques si possible’ pour les systèmes de certification des captures dépasse le fait d’assurer que les systèmes de certification des captures ne deviennent pas des obstacles inutiles au commerce. Ces critères et lignes directrices internationales seront un outil essentiel pour aider à fermer progressivement les marchés alternatifs pour les produits de la pêche INN et faire devenir la lutte contre la pêche INN véritablement mondiale. 

Appel à ce que l’UE interdise les subventions pour la pêche en haute mer

07 septembre 2014

La Global Ocean Commission (GOC), une initiative composée de 17 gouvernements et dirigeants d’entreprise, appelle à un système de gouvernance international pour la gestion des zones en haute mer dans son rapport intitulé « From Decline to Recovery: A Rescue Package for the Global Ocean » (Du déclin à la restauration des stocks de poissons : un plan de sauvetage pour les océans mondiaux). Afin de renforcer la gouvernance en haute mer, le GOC relaie l’appel lancé par la convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS) à protéger la biodiversité au-delà de la juridiction nationale. « Moins d’un pour cent des zones en haute mer est actuellement protégé, il est donc crucial que ce nouvel accord inclue des dispositions pour créer des zones protégées en haute mer », déclare un membre du GOC.

Plus particulièrement, le GOC a exhorté les gouvernements à éliminer progressivement les subventions aux carburants pour les flottes pêchant en haute mer, notamment les flottes de pêche au thon, au cours des 5 prochaines années.

Le rapport souligne que les flottes industrielles de 18 pays sont en train de « piller la haute mer » par le biais des subventions gouvernementales, en particulier les subventions versées pour le carburant de ces flottes. Plusieurs États membres de l’UE figurent sur la liste : l’Espagne – qui a alloué 1 073 millions de dollars US en subventions pour carburant en 2013, la France, le Royaume-Uni, le Danemark et l’Italie subventionnent fortement les dépenses en carburant de leurs flottes de pêche en haute mer. La Chine, le Japon, la Corée du Sud, les Philippines et les États-Unis fournissent également un certain montant de subventions à leurs flottes en haute mer. L’ONG Oceana a affirmé dans un communiqué de presse que sans ce soutien financier, les flottes industrielles ne pêcheraient probablement pas en haute mer.

Lors d’une conférence de presse, les co-présidents du GOC ont appelé les pays de l’UE à « cesser tout soutien financier pour la pêche en haute mer ». La commissaire européenne en charge de la pêche, Maria Damanaki, a relayé cet appel à tous les États membres. Elle a souligné que la nouvelle PCP, qui a commencé au 1er janvier 2014, a mis fin aux subventions qui permettaient aux flottes d’augmenter leur capacité, « mais il faut également tenir compte des subventions des États membres ». Son appel a été relayé par l’ancien ministre britannique des affaires étrangères, et co-président de GOC, David Milliband, qui est favorable à l’abolition des subventions pour la pêche en haute mer. Le rapport du GOC a déclaré que les gouvernements devaient plafonner et éventuellement éliminer progressivement les subventions aux carburants sur les 5 prochaines années. Cependant, si les océans continuent à se vider, les gouvernements devront envisager d’interdire totalement la pêche industrielle en haute mer, à l’exception des régions où une action des organisations régionales de gestion des pêches est efficace.

Commentaire éditorial

La demande du GOC d’éliminer les subventions versées pour les dépenses en carburant de la pêche industrielle en haute mer – y compris la pêche au thon industrielle – intervient à un moment où les négociations de l’OMC pour parvenir à un accord sur la réduction des subventions nuisibles aux pêcheries sont au point mort. Plusieurs appels similaires – par des scientifiques et des ONG – ont récemment été lancés, en vue de débloquer ces négociations en mettant l’accent sur les mesures portant sur la pêche industrielle en haute mer qui seraient, selon toute vraisemblance, soutenues par les pays en développement n’ayant pas de flotte industrielle. Bien que certaines références soient faites aux « intérêts des pêcheries artisanales des pays en développement », l’agenda du GOC est avant tout un agenda de préservation de l’environnement : soit supprimer les subventions à la pêche en haute mer au cours des 5 prochaines années, soit les interdire à la pêche industrielle (c’est-à-dire, de manière plus réaliste, concevoir et mettre en œuvre des zones protégées en haute mer). Il sera nécessaire pour les pays ACP de surveiller l’évolution de ces discussions, et d’examiner l’impact de la désignation de zones protégées en haute mer sur la durabilité et les recettes générées par les pêcheries au thon dans leurs zones économiques exclusives (ZEE), de façon à pouvoir faire entendre leurs voix dans ce débat qui, jusqu’à présent, implique seulement les pays développés ayant des activités de pêche en haute mer et les groupes environnementaux.  

L’UE et la Mauritanie reprennent le chemin des négociations pour un APPD

17 septembre 2014

Le deuxième cycle de négociations pour le renouvellement de l’accord de partenariat de pêche durable UE-Mauritanie (APPD) s’est achevé sans que les deux parties parviennent à un accord. Plusieurs parties prenantes se sont exprimées concernant les points litigieux en suspens entre les parties.

La date d’échéance du protocole a été le premier point d’achoppement : le gouvernement mauritanien considérait que l’accord actuel d’une durée de 2 ans était entré en vigueur le 31 juillet 2012, date à laquelle il avait été paraphé et à laquelle les navires de l’UE avaient été autorisés à pêcher dans les eaux mauritaniennes. La Commission européenne estimait quant à elle que la date d'entrée en vigueur était le 16 décembre 2012, date de sa ratification par le Conseil des ministres de l’UE pour signature et de son entrée en vigueur provisoire avant la décision du Parlement européen en octobre 2013. Un troisième cycle de négociations tenu en juillet est parvenu à un compromis : les chalutiers crevettiers et les chalutiers pélagiques de l’UE, qui n’ont pas sollicité de licences avant la fin de 2012, seront en mesure de continuer à pêcher dans les eaux mauritaniennes jusqu’à la fin 2014.

Les coûts généraux de l’accord sont également sources de discussions. Lors du deuxième cycle de négociations, l’UE a proposé de réduire la compensation, parallèlement à une réduction de quota pour les petits pélagiques, de 300 000 à 200 000 tonnes, en raison d’un faible niveau d’utilisation observé en 2013 et 2014. L’argument ici est que, avec les changements dans les zones de pêche pour les petits pélagiques, certains stocks sont maintenant hors de portée des flottes de l’UE. L’objectif de l’UE est en effet d’optimiser le financement alloué dans le cadre de ce protocole sur la base des captures réelles faites par la flotte de l’UE dans les eaux mauritaniennes. Pour compenser cette réduction, l’UE a également proposé d’allouer un soutien financier plus élevé pour le développement de pêcheries durables au travers du soutien sectoriel.

Interviewé à ce sujet, le négociateur en chef mauritanien a répondu que « ce n’est pas une règle de trois à travers laquelle vous payez moins si vous pêchez moins ». La compensation financière est un droit d’accès, réservant un quota aux flottes de l’UE qui ne peut être alloué à une autre partie, malgré le risque que la Mauritanie perde les montants des redevances des armateurs s’ils ne viennent pas. Elle offre aux flottes de l’UE un accès à une zone sûre, proche de l’UE et des marchés africains et présentant du poisson en abondance. L’UE paie également pour avoir un accès prioritaire aux ressources par rapport aux autres partenaires étrangers. Cette compensation financière ne doit pas être confondue avec les redevances payées par chaque navire pour chaque tonne capturée.

Pour les autorités mauritaniennes, un autre bénéfice majeur du protocole actuel est qu’il impose aux pêcheurs de débarquer leurs captures dans les ports mauritaniens. Toutefois, le secteur de la pêche espagnol considère que ces débarquements obligatoires sont un désavantage – tel qu’exprimé lors d’une visite des négociateurs de l’UE aux îles Canaries, durant laquelle ils ont souligné que le protocole actuel avait débouché sur la perte de 3 000 emplois et d’environ 40 millions d’euros. Une plate-forme d’opérateurs a été créée avec une période de transition de 5 à 10 ans, durant laquelle ils coopéreront (avec le soutien de l’UE) avec la Mauritanie, transférant des technologies, de l’infrastructure, des procédures et du savoir-faire pour développer les infrastructures de débarquement/transformation en Mauritanie, tout en recherchant des alternatives commerciales pour leurs propres installations.

Enfin, l’interdiction de pêche imposée aux navires européens de pêche de céphalopodes reste problématique pour le secteur de la pêche espagnol, qui estime qu’avec le nouveau modèle de gestion proposé par les scientifiques espagnols, « il y aurait du poulpe pour tout le monde ». En revanche, le secteur artisanal mauritanien a récemment manifesté, exhortant le gouvernement à continuer à appliquer l’accord relatif à la protection du poulpe. Dans le rapport de sa dernière réunion, le Comité scientifique mixte de l’APPD UE-Mauritanie indique que les détails fournis par les scientifiques espagnols jusqu’à présent ne leur permettent pas de valider ce nouveau système de gestion.

L’UE et la Mauritanie se rencontreront à Bruxelles pour un quatrième cycle de négociations.

Commentaire éditorial

Les discussions concernant le renouvellement compliqué de l’APPD entre l’UE et la Mauritanie mettent en exergue des questions pertinentes pour tous les pays ACP entreprenant un APPD. De toute évidence, l’ancien protocole UE–Mauritanie incluait des aspects que plusieurs voient comme favorables au développement de la pêche locale, y compris le débarquement obligatoire de toutes les captures. Un point important souvent mentionné est la nécessité d’aborder l’absence d’infrastructure locale et de savoir-faire dans les pays tiers partenaires concernés, afin de maximiser les bénéfices de ces débarquements. L’initiative proposée par les opérateurs des îles Canaries (c’est-à-dire de planifier avec leurs collègues mauritaniens le transfert de technologies, d’infrastructures, de procédures et de savoir-faire afin de développer les infrastructures de débarquement/transformation à plus forte valeur ajoutée en Mauritanie) est une piste intéressante. Comme l’ont déclaré certaines ONG, les entreprises conjointes souhaitées entre les opérateurs de pêche de l’UE et ACP – un point promu dans le cadre des APPD – pourraient être davantage liées à l’ajout de valeur et à la transformation dans le pays ACP plutôt qu’à la capture de poisson. Le soutien sectoriel ainsi que le soutien du Fonds européen de développement pourrait faciliter ce type d'initiatives.

Un autre point crucial débattu ici est la base sur laquelle la contribution financière doit être fixée. Doit-elle être proportionnelle au niveau des possibilités de pêche, afin de garantir la rentabilité des deniers des contribuables européens ?  Les nouvelles caractéristiques de l’APPD (par ex. le fait que l’UE ait un accès prioritaire à l’excédent avant les pays tiers) doivent-elles être comprises dans la détermination de la compensation et si oui, comment ? Comment le soutien sectoriel devrait-il être versé en complément des autres fonds de développement de l’UE ? Ces questions et d’autres encore suggèrent que les pays ACP ayant un intérêt dans les APPD gagneraient à entamer un dialogue avec l’UE sur la manière dont la politique de pêche extérieure de l’UE réformée sera mise en œuvre. 

La Guinée Bissau et l’UE relancent la procédure pour un APPD

18 septembre 2014

Après les élections nationales en avril 2014, la commissaire européenne chargée des affaires maritimes et de la pêche a rencontré le nouveau premier ministre de la Guinée-Bissau et le Secrétaire d’État à la pêche afin de discuter de la coopération dans le secteur de la pêche. Les deux parties sont convenues de relancer la procédure de ratification de l’APPD. Un protocole de 3 ans avait été négocié en 2012 mais il n’est jamais entré en vigueur après le coup d’État en Guinée-Bissau en avril 2012.

Le protocole de 2012 offrait à l’UE des opportunités de pêche pour le thon, les céphalopodes et les crevettes. L’UE avait accepté de payer à la Guinée-Bissau une compensation annuelle de 9,2 millions d’euros, dont 3 millions sont réservés pour soutenir la politique de pêche de la Guinée-Bissau. La France, le Portugal et l’Espagne sont les États membres de l’UE présentant le plus d’intérêt dans cet accord de pêche.

D'autres sujets d’intérêt mutuel ont été évoqués pendant la réunion, et notamment la nécessité d’accroître la coopération dans la lutte contre la pêche illicite, afin d’établir la transparence et d’assurer l’apport effectif du soutien de l’UE au secteur de la pêche de la Guinée-Bissau.

S’agissant de la transparence, il convient de noter que la Guinée-Bissau a publié les accords qu’elle a conclus avec les entreprises ou pays étrangers, y compris l’UE, le Sénégal et la Chine.

L’accord conclu avec la Chine pour une période de 4 années pour  la capture de crevettes,de céphalopodes et d' espèces démersales couvre en fait uniquement les activités des navires d’une seule entreprise chinoise: la China Fisheries National Corporation (CNFC). D’autres navires d’origine chinoise sont également actifs dans les eaux guinéennes : en juin, quatre navires chinois de l’entreprise Shi Hai ont commencé à pêcher en Guinée-Bissau en vertu d’accords d’affrètement. Leurs activités approvisionneront essentiellement les marchés nationaux. La presse a annoncé que la transaction d’affrètement a été conclue pour environ 100 000 euros.

Commentaire éditorial

Le protocole de 3 ans négocié entre l’UE et la Guinée-Bissau contient des dispositions selon lesquelles les navires de l’UE ne devraient avoir accès qu’à l’excédent de ressources telles que les crevettes et les céphalopodes, en tenant compte de la nécessité de maintenir un effort de pêche durable. Celui-ci était basé sur les données scientifiques disponibles les plus fiables et était conforme à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS) et la politique de pêche commune (PCP) réformée (même si la réforme n’était pas finalisée à cette époque). Un élément crucial est la nécessité de créer une totale transparence de l’effort de pêche global de toutes les flottes pêchant dans les eaux guinéennes ; l’initiative de la Guinée-Bissau de publier ses accords de pêche avec les pays tiers est, par conséquent, une mesure louable. Toutefois, le contexte a changé depuis 2012, en particulier avec l’arrivée des navires d’origine chinoise, non couverts par le protocole d’accord de pêche Guinée-Bissau-Chine /CNFC, et ces navires représentent un effort de pêche supplémentaire. Pour prendre cela en compte, la CE souligne que, le cas échéant, les deux parties peuvent adopter de nouvelles mesures pour garantir la gestion durable des stocks halieutiques, notamment l’ajustement des opportunités de pêche ou la fermeture d’une zone de pêche. En ce qui concerne les espèces hautement migratoires couvertes par le protocole, les parties conviennent de se conformer aux recommandations de l’ICCAT (Commission Internationale pour la Conservation des Thonidés de l'Atlantique), du COPACE (Collections statistiques de capture régionale Atlantique Centre-Est) et de la CSRP (Commission Sous-Régionale des Pêches).

L’UE et Madagascar conviennent d’un nouveau protocole d’APPD

21 septembre 2014

L’UE et Madagascar ont paraphé un protocole de 4 ans à l’APPD. La compensation financière de l’UE pour cet accord est d’environ 6 millions d’euros pour la période ; des opportunités de pêche seront offertes à 40 senneurs à la senne coulissante et à 54 palangriers pour la capture du thon et des espèces associées (y compris les requins). Une plus grande proportion des coûts d’accès sera payée par les armateurs : la Commission européenne informe que « les conditions définies aideront à doubler la part payée par les armateurs ». Le prix payé à la tonne sera augmenté, et la part de la contribution réservée au soutien sectoriel est également augmenté pour atteindre 700 000 euros par an, contre 550 000 par an lors du protocole précédent.

L’évaluation rétrospective et prospective a formulé une série de recommandations, notamment sur le mécanisme de validation des captures de thonidés, qui nécessite des « améliorations tant dans l’utilisation du référentiel de la zone de pêche malgache que dans la transmission des données détaillées (dont l’effort de pêche) et agrégées ».

Pour traiter ce problème, le nouveau protocole énonce une série d’améliorations techniques liées à la surveillance et à la déclaration des captures :

  • des déclarations trimestrielles des captures et de l’effort de pêche ;
  • la mise en place des conditions pour la transmission électronique des données de capture ;
  • l'utilisation des observateurs ; et
  • une définition claire des limites des zones de pêche.

La définition des zones accessibles à la flotte de l’UE dans les eaux malgaches permet également de préserver les activités de la pêche artisanale.

Des mesures de protection des requins interdisent la pêche des espèces les plus vulnérables et introduisent des mesures de gestion pour les espèces autorisées, avec des captures maximales autorisées de 250 tonnes par an.

La CE a souligné que le protocole paraphé est totalement conforme à la stratégie nationale récemment adoptée par Madagascar pour les pêcheries au thon et soutenue par le programme régional Smartfish financé par l’UE.

Comparés à la situation actuelle, ces avantages financiers seront augmentés de 20 %.

Commentaire éditorial

Les incertitudes passées liées à la délimitation de certaines zones économiques exclusives (ZEE) des pays ACP ont mené à divers incidents, dans lesquels il était souvent difficile pour le pays côtier de déterminer si un navire avait pêché en dehors ou au sein d’une ZEE – auquel cas le navire nécessitait une licence appropriée pour ce faire. L’existence de ces « zones grises » complique encore plus la tâche des pays désireux de contrôler leurs eaux comme il se doit. La clarification de la situation au travers du processus d’APPD serait la bienvenue, non seulement pour la relation UE-Madagascar, mais pour toutes les opérations de pêche intervenant au sein de la ZEE de Madagascar. Toutes les autres mesures visant à améliorer les déclarations de capture, telles que la mise en place d’une transmission électronique quotidienne des données de capture, sont des mesures positives qu’il serait utile de répliquer. 

L’APPD UE-Maroc finalement signé par le Maroc : les pêcheurs européens espèrent redémarrer leurs activités en août

22 septembre 2014

Le roi du Maroc Mohammed VI a profité de la visite du roi Felipe VI d’Espagne pour annoncer que, finalement, il signera l’accord de pêche avec l’Union européenne. Cela permettra aux navires de l’UE, principalement espagnols, de reprendre la pêche dans les eaux marocaines, d’où ils avaient été exclus en décembre 2011. La signature du Maroc était attendue depuis février. Jusqu’à 120 navires de 11 pays européens (principalement d’Espagne mais également du Portugal, d’Italie, de France, d’Allemagne, de Lituanie, de Lettonie, du Pays-Bas, d’Irlande, de Pologne et du Royaume-Uni) pêcheront en vertu du nouveau protocole.

La commissaire européenne chargée des affaires maritimes et de la pêche, Maria Damanaki, a salué la signature, et souligné que « [la CE] s'est assurée que les droits de pêche accordés à l'UE ne dépassent pas la limite scientifiquement fiable pour garantir une pêche durable, et que les navires européens ne sont pas mis en concurrence avec les pêcheurs locaux. Je suis convaincue que l'aide financière de l'Union contribuera à la construction d'un avenir durable pour le secteur de la pêche au Maroc grâce à une aide sectorielle ciblée ».

L’UE a négocié l’accès au Maroc à des espèces qui ne sont pas pleinement exploitées (ou qui sont surexploitées), la conséquence étant que la zone de pêche du Maroc en Méditerranée est réservée aux opérateurs marocains, tout comme certaines pêcheries telles que le poulpe et les crustacés.

L’industrie de la pêche espagnole a globalement salué le nouvel accord car la « fermeture » de la pêche en Guinée Conakry, « l’absence de mise en œuvre de l’accord » avec la Guinée-Bissau, et le « non-démarrage » de l’accord de pêche avec le Sénégal, impliquaient que les zones de pêche de leurs flottes s’arrêtaient en Gambie et en Sierra Leone, qui sont « bien plus pauvres en ressources halieutiques ». Par conséquent, elle espère être en mesure de reprendre ses  opérations de pêche dans les eaux marocaines en août, et espère également que d’autres pêcheries, telles que le poulpe, s’ouvriront à elle à l’avenir.

Le secteur de la pêche marocain estime que certains aspects doivent être revus pour le prochain protocole. « Le débarquement des captures des navires dans les ports marocains serait un bon moyen de s’assurer que les quotas de pêche sont respectés », a déclaré un représentant du secteur de la pêche. « Tant que le Maroc n’aura pas réussi à obtenir cela, et malgré tous les mécanismes, une grande partie des ressources halieutiques marocaines risquent d’échapper à tout contrôle ».  

Commentaire éditorial

L’ouverture des zones de pêche marocaines va quelque peu améliorer la situation des flottes actuellement incapables d’accéder à d’autres zones de pêche en Afrique de l’Ouest (Mauritanie, Guinée, etc.). Ceci met en exergue le fait que toutes les flottes de pêche étrangères (par ex. européennes, asiatiques) – même celles pêchant des stocks non-migratoires – tournent entre les différentes zones de pêche d’une région, en fonction de la disponibilité ou des possibilités de pêche ou encore des conditions imposées par le pays côtier. Ceci suggère que les pays ACP d’une région donnée devraient partager les données concernant les flottes étrangères opérant dans leurs eaux, et les conditions liées, pour être en mesure d’anticiper les problèmes pouvant découler du déplacement des navires d’une zone de pêche à une autre : une concurrence potentielle avec l'industrie locale, une pression accrue sur certaines ressources, etc. Pour éviter ces problèmes, les pays côtiers dans une région devraient harmoniser les conditions d’accès proposées à toutes les flottes étrangères, y compris mais sans limitation aucune, à celles pêchant en vertu d’accords de pêche. Les efforts de la Commission sous-régionale des pêches d’Afrique de l’Ouest visant à assurer que les huit membres mettent en œuvre la Convention sur les conditions minimales d’accès (CMA) sont un bon exemple. Cette Convention pourrait devenir une référence utile pour les accords futurs signés avec les entités ou pays étrangers (par ex. la Chine, la Russie et l’UE). 

L’UE et le Mozambique ouvrent des négociations sur le renouvellement du protocole à l’accord de partenariat de pêche durable

23 septembre 2014

L’UE et le Mozambique se sont rencontrés à Maputo pour lancer des négociations sur le renouvellement du protocole à l’APPD qui expire le 31 janvier 2015. Le protocole actuel, qui est pleinement entré en vigueur le 13 juin 2012, prévoit un accès à la zone de pêche mozambicaine pour 43 senneurs et 32 chalutiers de surface européens. Il a été convenu que le prochain cycle de négociations se tiendrait à Bruxelles en septembre 2014.

Au même moment, le ministre de la pêche du Mozambique a annoncé que l’entreprise mozambicaine de pêche au thon Empresa Moçambicana de Atum (Ematum) devrait commencer à opérer avant la fin de 2014, après l’arrivée des cinq premiers navires de pêche commandés en France – livraison prévue pour septembre – et qui devraient capturer 1 500 tonnes de thon par an. D’après le quotidien mozambicain Notícias, l’entreprise Ematum, qui est détenue à 67 % par l’État et à 33 % par des investisseurs privés, ne sera pleinement opérationnelle qu’en 2015, après l’arrivée prévue de 16 autres navires de pêche.

Ceci fait partie du Plan stratégique du Mozambique pour le développement de la pêche au thon visant à accroître ses bénéfices pour le Mozambique. Un représentant du ministère de la pêche du Mozambique a souligné que « sur les 60 millions de dollars générés par la pêche au thon, à peine un million reste au Mozambique ». La pêche au thon au Mozambique est actuellement assurée par plus de 100 navires de pêche, dont la majorité est d’origine étrangère, notamment du Japon et d’Europe ; l’on ne dénombre qu’un seul thonier mozambicain.

Dans le cadre des efforts visant à assurer que la pêche au thon soit principalement effectuée par des opérateurs mozambicains, le ministre de la pêche a déclaré qu’un total de 15 projets de pêche au thon avaient récemment été présentés par des investisseurs potentiels mozambicains et étrangers de pays tels que l’Indonésie, la Chine, la Corée du Sud et le Portugal, comprenant également des usines de transformation. Ces projetscontribueront à la création d’emplois, en aidant à réduire la pauvreté dans certaines régions côtières, telles que la région de Nampula. D’autres investissements dans le secteur de la pêche de la région, estimés à environ 10 millions de dollars ont été consentis par des entreprises de Chine et du Portugal pour capturer la crevette, le homard et le mérou, pour exportation. 

Commentaire éditorial

Les relations de pêche entre l’UE et les opérateurs des États membres de l’UE et le Mozambique vont bien au-delà de l’accès des navires thoniers européens aux eaux mozambicaines, qui constitue la base de la négociation du nouveau protocole d’APPD. Plus particulièrement, des entreprises privées européennes sont impliquées dans des projets d’investissement pour le thon, mais aussi pour d’autres ressources (crevettes, homards, mérous) qui seront exportées vers les marchés internationaux, y compris, plus que probablement, les marchés de l’UE. Étant donné que la protection des investissements privés européens dans les pays tiers est, depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, une compétence de l’UE, l’on peut se demander si l’UE n’a pas un rôle à jouer en veillant à ce que ces investissements dans les pêcheries ACP soient protégés. Elle pourrait ainsi veiller à ce que ces investissements soient compatibles avec l’exploitation durable des pêcheries. L’on pourrait faire valoir que le soutien sectoriel fourni dans le cadre des APPD – et de plus en plus souvent complété par des actions entreprises en vertu du FED (Fonds européen de développement) – axé sur l’amélioration des capacités du pays partenaire pour développer des pêcheries durables (par ex. la recherche, le suivi, le contrôle et la surveillance, le soutien au secteur artisanal, la conformité aux règlements sanitaires et phytosanitaires) peut contribuer à fournir au pays partenaire les outils dont il a besoin pour assurer que ces investissements privés produisent effectivement des bénéfices sociaux et économiques à long terme.  

L’UE et l’Espagne soutiennent le travail de la FAO pour un registre mondial des navires de pêche

24 septembre 2014

S’exprimant sur l’issue du 31ème Comité des pêches de la FAO, la CE a noté qu’un accueil largement favorable a été réservé à la mise en place d’un registre mondial des navires de pêche – notamment l’utilisation du numéro de l’Organisation maritime internationale comme unique identifiant du navire pour la phase 1 du registre – promue par la FAO. Pour ce projet, la FAO dispose d’un budget annuel d’environ 500 000 dollars, et l’Espagne a annoncé qu’elle contribuerait à concurrence de 250 000 dollars. Le Secrétaire général espagnol de la pêche a souligné qu’il s’agit d’un « outil essentiel pour lutter contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), puisque cela permet de savoir quels navires opèrent de manière licite ».

Pour ce faire, le registre mondial a pour objectif de centraliser les données des navires de pêche, des navires de transport réfrigéré et des ravitailleurs. Seuls les registres de navires certifiés et à jour fournis par les autorités responsables seront utilisés. La priorité immédiate de la FAO est le développement et la mise en œuvre du système à ce stade initial. La feuille de route du développement du registre mondial repose sur trois piliers principaux : développement d’un système robuste et rentable, développement des capacités et sensibilisation. Le projet de la FAO a été entrepris en collaboration avec la Commission européenne (DG Mare) pour définir des spécifications dans le but normaliser les informations sur les navires.

Non seulement l’Espagne financera le projet mais elle participera au Comité consultatif du projet « en partageant ses compétences dans le domaine, dans lequel les services d’inspection du Secrétariat général des pêches travaillent depuis 2000 ».

Commentaire éditorial

La création d’un registre mondial des navires de pêche, basé sur l’utilisation d’un identifiant unique des navires, sera un outil utile permettant non seulement de dévoiler les navires engagés dans des activités de pêche INN mais aussi d’améliorer la traçabilité des produits de la pêche. Ce registre mondial aidera enfin tous les acteurs de la chaîne d’approvisionnement du poisson à vérifier que le poisson qu’ils utilisent ne provient pas d’un navire engagé dans des opérations de pêche INN. En ce sens, cette initiative aidera à renforcer les systèmes de certification des captures, tels que celui mis en place par le règlement INN de l’UE, qui doivent être ancrés dans un système de traçabilité robuste. 

Problèmes émergents en matière d’évaluation et de gestion de la sécurité et de la qualité des produits de la mer

03 octobre 2014

La FAO a publié un nouveau document technique sur les pratiques actuelles et les problèmes émergents en matière de sécurité et de qualité des produits de la mer, notamment le cadre réglementaire changeant au niveau international, dans le contexte de l’Organisation mondiale du commerce, de la Commission du Codex Alimentarius, du Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO, et de l’Organisation mondiale de la santé animale.

Le document, publié en août 2014, évoque également les défis qui se posent aux pays en développement, notamment la pression potentiellement croissante exercée sur les pays en développement pour se conformer aux normes privées. Les producteurs des pays en développement et les transformateurs ont jusqu’à présent été peu exposés à cette pression, en raison de trois facteurs principaux :

  • Sauf quelques exceptions – telles que le thon tropical en conserve ou les crevettes – les pays en développement approvisionnent proportionnellement de faibles volumes vers les marchés où les normes privées dominent, tels que les marchés européens de l’Allemagne et du Royaume-Uni.
  • Les pays en développement approvisionnent du poisson et des produits de la mer non-transformés ou ayant subi une transformation minime, tandis que les normes privées s’appliquent principalement aux produits transformés à plus forte valeur ajoutée pour les marques ou les labels privés. Par exemple, le poisson transformé des pays en développement  représente moins de 10 % des ventes dans les supermarchés français et italiens. À l’exception des produits en conserve, le poisson et les produits de la mer des pays en développement sont généralement importés sous forme de poisson entier ou de filets surgelés – et ces produits sont soumis à peu d’exigences dépassant celles requises par la réglementation publique.
  • Les pays en développement ont tendance à opérer au sein de chaînes d’approvisionnement présentant un faible niveau d’intégration et, par conséquent, une interface directe limitée avec les distributeurs et les systèmes de normes privées.

Ce dernier point est débattu plus en détail dans le document, en soulignant que les différences au niveau des structures des chaînes d’approvisionnement engendrent des différences en termes de pression ressentie pour se conformer aux normes privées. Il existe trois types de structures de chaînes d’approvisionnement dans les pays en développement.

  • Les chaînes d’approvisionnement verticalement intégrées : « celles où les activités de pisciculture/capture, transformation et transport vers les grossistes/détaillants européens sont totalement sous le contrôle d’une entreprise transnationale ».
  • Les chaînes d’approvisionnement collaboratives : celles où les plus grands producteurs ou groupes de petits producteurs « travaillent avec les exportateurs qui, à leur tour, via leurs relations avec les importateurs,  communiquent les exigences de marché » aux producteurs.
  • Les chaînes d’approvisionnement fragmentées : « caractérisées par une série de petits fournisseurs ». Dans ce cas, « il y a moins de relations directes par lesquelles les informations sur les exigences en matière de sécurité des denrées alimentaires et de qualité peuvent être communiquées aux producteurs ».

L’étude souligne que la plupart des exportations des pays en développement s’inscrivent dans le cadre du dernier type de chaîne d’approvisionnement, ce qui limite l’interface avec les normes privées mais qui est également le signe de l’incapacité de ces pays à s’engager dans ces systèmes. « Le résultat », conclut le document, « est qu’ils ratent les opportunités que ces systèmes peuvent offrir en termes de potentiel de production de produits à plus forte valeur ajoutée et d’accès aux segments lucratifs des marchés des pays développés ».

Commentaire éditorial

Dans l’UE et dans d’autres marchés rentables pour le poisson, les supermarchés dominent incontestablement la distribution de poisson et de produits de la mer, et du fait d’une plus grande sensibilisation du public à la durabilité et aux critères de qualité, leurs politiques d’acquisition sont de plus en plus exigeantes pour les producteurs. Dans l’UE, le niveau des exigences réglementaires ne cesse d’augmenter, notamment les nouvelles exigences en termes d’étiquetage, de traçabilité et de normes SPS. Pour que l’information concernant les exigences des distributeurs et du public soit communiquée aux producteurs ACP, et pour que le soutien nécessaire soit fourni en vue de satisfaire à ces nouvelles exigences, souvent coûteuses, il est indispensable que les diverses parties prenantes du processus de production – pêcheurs, pisciculteurs, exportateurs, importateurs et distributeurs européens – soient mieux reliées. C’est déjà le cas bien souvent pour le thon, où la filière est verticalement intégrée, et les efforts devraient se concentrer sur les pêcheries artisanales et les opérations d’aquaculture – l’on dénombre déjà certaines expériences fructueuses, qui gagneraient à être documentées et partagées. Une assistance destinée à améliorer l’infrastructure et la législation dans les pays ACP pour promouvoir la conformité aux normes serait également la bienvenue.

Le Nigeria vise la réduction de ses importations de poisson

03 octobre 2014

Certains articles de presse publiés récemment évoquent les plans du Nigeria visant à réduire les importations annuelles de poisson, ainsi que l’introduction de stratégies nationales pour garantir le développement de la pêche et de la pisciculture pour approvisionner le marché local, promouvoir l’emploi local, les revenus et les recettes liées aux opérations de change. Cette initiative s’inscrit parfaitement dans la politique gouvernementale visant à améliorer l’autosuffisance, notamment dans les secteurs du riz et du sucre du pays.

Ces dernières années, les entreprises étrangères, notamment européennes, sont la source de la plupart du poisson importé au Nigeria (principalement des petits pélagiques). Certaines de ces entreprises ont établi des chambres froides au Nigeria, vendant du poisson à des opérateurs locaux et agissant en tant que distributeurs directs vis-à-vis du public. Le directeur général de Vessa Fisheries a déclaré que « certaines de ces entreprises étrangères augmentaient les prix du poisson à un niveau très élevé pour les acheteurs locaux, qui étaient néanmoins contraints d’acheter leur poisson auprès d’elles puisqu’il n’y avait aucune source alternative », après quoi elles baissaient les prix en utilisant leurs propres structures de vente au détail.

En conséquence, les vendeurs nigérians étaient contraints de travailler à perte et étaient incapables de rembourser les entreprises étrangères, puisque la plupart des approvisionnements de poisson étaient fournis à crédit : « Bien souvent, les entreprises étrangères finissent par reprendre leurs chambres froides », poursuit le directeur général. Ce monopole des entreprises étrangères en matière d’importation a généré une situation où la qualité du poisson importait peu, et de grandes quantités de poisson pourri ont inondé les marchés nigérians. Pour traiter ce problème, le gouvernement a établi des quotas d’importation pour les entreprises étrangères dès la fin 2013, plafonnant les importations de poisson à 125 000 tonnes pour le premier semestre 2014.

Pour offrir des sources alternatives de poisson, des filières d’aquaculture et de pêcheries artisanales sont en train d’être établies au Nigeria. Les pisciculteurs ont reçu des jeunes poissons et de l’alimentation pour poisson subventionnée, et le gouvernement négocie avec des investisseurs pour la mise en place de bassins d’élevage de tilapia à grande échelle dans de nombreuses régions du pays. Certaines entreprises et États membres de l’UE sont également intéressés à soutenir les efforts du Nigeria en matière de développement de l’aquaculture. En août, le Nigeria a signé un mémorandum d’accord avec Malte pour développer des « parcs à poissons industriels », ayant pour objectif de produire plus de 250 000 tonnes de poisson par an. « Plusieurs industries et services seront établis autour des installations pour créer plus d’un million d’emplois directs et indirects », affirme le ministère de la pêche nigérian. Une entreprise néerlandaise, Nutreco, a également annoncé en juin qu’elle allait investir dans la production locale d’alimentation pour poisson à destination du Nigeria et de la région ouest-africaine au sens large.

Certaines initiatives gouvernementales annoncées fin juillet par Foluke Areola, directrice intérim du département de la pêche, ont donné un coup de pouce aux pêcheries d’espèces sauvages. Les pêcheurs artisanaux ont reçu des filets et d’autres intrants, et la création d’industries de transformation à plus forte valeur ajoutée sera encouragée, en particulier pour les crevettes, pour lesquelles le ministère s’engage actuellement dans la voie de la certification Marine Stewardship Council. Le pays ouvre également sa Zone économique exclusive (ZEE) en encourageant les entreprises à importer des navires de pêche en haute mer au Nigeria, ajoute Mme Areola. En outre, afin d’améliorer les capacités de gestion des pêcheries, un navire de recherche d’une valeur de 10 millions d’euros a été commandé par le gouvernement à la Pologne pour l’Institut nigérian d’océanographie et de recherche marine (NIOMR).

Commentaire éditorial

Le Nigeria est un des plus grands marchés du poisson en Afrique, et il est en effet vital de mettre en place des sources alternatives de poisson, en particulier pour la consommation locale, afin de minimiser les impacts d’une interdiction partielle des importations, au travers de la mise en place de quotas limités. À plus long terme, et étant donné que les petits pélagiques fournis au Nigeria proviennent en partie des zones de pêche très riches d’Afrique de l’Ouest (Mauritanie et Sénégal), il serait peut-être intéressant de considérer comment améliorer les routes commerciales régionales entre ces pays. Dans ce contexte, les organes régionaux tels que la CEDEAO ont un rôle important à jouer, et leurs efforts visant à améliorer la commercialisation de poisson au niveau régional pourraient être soutenus par la coopération au développement de l’UE.

Les États membres de l’UE ayant dépassé leurs quotas de pêche en 2013 verront leurs quotas réduits en 2014

03 octobre 2014

D’après un communiqué de presse publié par Maria Damanaki, commissaire européenne en charge des affaires maritimes et de la pêche, « les dix États membres qui ont déclaré avoir dépassé leurs quotas de pêche en 2013 verront leurs quotas de pêche pour ces stocks réduits en 2014 ». La CE annonce ces déductions sur une base annuelle afin de « remédier immédiatement aux dommages occasionnés aux stocks surexploités durant l'année écoulée et de garantir une utilisation durable des ressources halieutiques communes par les États membres ». Par rapport à l’an dernier, « le nombre de déductions faites a baissé de 22 % ». 

Mme Damanaki a déclaré que « si nous voulons lutter sérieusement contre la surpêche, il faut appliquer nos règles à la lettre, et ceci vaut aussi pour le respect des quotas. Je suis heureuse de constater que nous sommes mieux parvenus à les respecter en 2013 qu’au cours des années précédentes. Cela dit, pour assurer la bonne santé des stocks halieutiques européens, nous avons également besoin de contrôles efficaces pour faire respecter les règles en vigueur ». 

La commissaire a noté que la déduction de quota a affecté la Belgique, le Danemark, la Grèce, l’Espagne, la France, l’Irlande, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal et le Royaume-Uni et 45 stocks de poissons, ajoutant que « les déductions de quota s'appliquent sur les mêmes stocks que ceux qui ont été surexploités au cours de l'année précédente et des déductions supplémentaires sont appliquées en cas de surpêche ultérieure, en cas de dépassement des quotas de plus de 5 % ou lorsque le stock concerné fait l'objet d'un plan pluriannuel ».

Lorsqu’un État membre ne dispose pas de « quotas de pêche suffisants pour restituer le volume de sa surpêche, ces quantités seront déduites d'un autre stock dans la même zone géographique, en tenant compte de la nécessité d'éviter les rejets dans les pêcheries mixtes ». Dans ces cas, une consultation est organisée avec les États membres concernés, et les résultats de ces consultations seront publiés plus tard en 2014. Si les quotas disponibles ne suffisent pas pour couvrir la totalité des déductions en question, le solde est reporté à l’année suivante.

Les États membres qui ont été sanctionnés sont : l’Espagne, la Belgique, le Danemark, la Grèce, la France, l’Irlande, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal et le Royaume-Uni.

Commentaire éditorial

Les systèmes de quotas– qu’ils impliquent ou non la transférabilité des quotas entre les opérateurs – ont été mis en place ou sont proposés pour gérer différentes pêcheries dans les pays ACP (Namibie, Afrique du Sud, Afrique de l’Ouest, etc.). L’exemple de l’UE montre que l’enregistrement des niveaux de pêche réels, ainsi que le respect ou non-respect des quotas, sont d’une importance capitale. Il montre également que des systèmes de « remboursement »/ pénalités doivent être mis en place pour aborder ces situations où les quotas ne sont pas respectés et où l’on pratique la surpêche. Ceci suggère que la mise en œuvre fructueuse d’un système de quotas nécessite un suivi, un contrôle et une surveillance efficaces, qui sont encore loin d’être entièrement satisfaisants dans de nombreux pays ACP. D’autres actions complémentaires peuvent également être entreprises par les gestionnaires de pêcheries pour détecter lorsque des quotas ne sont pas respectés, par exemple la vérification des incohérences entre les données de capture et les données des ventes. Ceci exige une coopération améliorée entre les ministères nationaux de la pêche et du commerce.

Le merlu sud-africain prospère avec le label écologique du Marine Stewardship Council

07 octobre 2014

Le Marine Stewardship Council (MSC) affirme que 10 ans après avoir octroyé son label écologique à la pêcherie de merlu d’Afrique du Sud, cette pêcherie a non seulement prouvé sa crédibilité environnementale, mais a également démontré que la durabilité environnementale peut générer des gains économiques à long terme.

Le MSC rapporte que des études récentes ont prouvé que la certification écologique de la pêcherie de merlu, l’une des plus anciennes pêcheries d’Afrique du Sud, a contribué à créer des opportunités de diversification vers des marchés d’exportation non-traditionnels, notamment dans les États membres de l’UE tels que le Royaume-Uni, l’Allemagne et la Suède, où « les engagements des acheteurs pour la durabilité ont souvent été moteurs ».

Actuellement, la pêche au merlu d’Afrique du Sud représente des recettes d’exportation annuelles d’environ 187 millions de dollars. L’étude a montré que, sans la certification MSC, la pêcherie au chalut du merlu d’Afrique du Sud pourrait perdre 35 % de sa valeur actuelle nette en 5 ans. La perte résultant de la contribution de la pêcherie au produit intérieur brut (PIB) serait de 28 à 47 %, à laquelle s’ajouterait le risque de perte de 12 000 emplois dans le secteur de la pêche et dans les industries connexes.

Les améliorations apportées aux pratiques de pêche ont également mené à des gains environnementaux, notamment une baisse de 90 % de la mortalité des oiseaux marins (grâce à l’utilisation par les navires de lignes destinées à effrayer les oiseaux). Par ailleurs, dans le cadre des éléments requis pour maintenir la certification MSC, les zones de chalutage ont été cartographiées avec les données fournies par le secteur. Ces informations ont alors été utilisées pour délimiter les zones de chalut afin d’éviter d’endommager les zones peu chalutées et pour préserver des refuges naturels du merlu. En outre, des recherches pointues sont actuellement menées par le secteur dans l’océan Atlantique, à 100 miles nautiques au large des côtes occidentales de l’Afrique du Sud, où le secteur de la pêche au chalut a convenu d’arrêter la pêche dans certaines zones pendant 4 ans pour surveiller la régénération de l’écosystème dans les zones protégées.

La certification a également contribué à une coopération plus étroite entre les scientifiques, les ONG et l’industrie pour gérer cette pêcherie de manière durable.

Commentaire éditorial

Au fil des années, la pratique du chalutage dans les eaux tropicales a donné lieu à une vaste controverse, en raison de son impact sur l’environnement  global et sur les espèces non ciblées. L’exemple de la pêche au chalut certifiée MSC en Afrique du Sud prouve que des améliorations ont été introduites grâce à l’éco-certification, avec des avantages environnementaux et sociaux indéniables. Les gains économiques engrangés ne sont cependant pas évidents, en particulier si cette certification a généré une prime pour les produits sur les marchés finaux. Dans le cas de l’Afrique du Sud, le rôle du MSC a été d’accompagner une dynamique de changement plutôt que de certifier une pêcherie qui était déjà durable dès le départ. L’exemple montre également qu’il y a eu des investissements massifs dans le secteur, notamment dans de nouveaux engins, dans la recherche et la fourniture de données, ainsi qu’une interaction avec d’autres parties prenantes. La question est de savoir si une telle dynamique pourrait être obtenue par des opérateurs à plus petite échelle ayant moins de capital à investir dans les initiatives liées à la gestion, en particulier si les bénéfices économiques à court terme ne peuvent être utilisés pour financer les investissements. 

Développements dans les relations de pêche Ghana–UE

07 octobre 2014

En visitant la Fisheries Enforcement Unit à Tema au mois d’août, le ministre ghanéen de la pêche et de l’aquaculture a affirmé que « l’industrie de la pêche, si elle est soigneusement exploitée, peut contribuer de manière significative à la génération de revenus au Ghana ». À cette fin, le Ghana doit relever une série de défis.

Tout d’abord, comme souligné par le ministre, le pays a la possibilité d’élargir ses marchés internationaux pour son poisson, à condition que les règlements sur la pêche illicite « soient appliqués rapidement ». Le directeur de la formation navale du Ghana a déclaré à des journalistes que dans le cadre de l’application de la loi, des dispositifs de localisation ont maintenant été installés sur tous les thoniers et chalutiers – et qu’il est désormais illégal pour un navire d’aller pêcher sans ce dispositif.

La lutte contre la pêche illicite est capitale dans le cadre des relations commerciales de pêche avec l’UE. En novembre 2013, l’UE levait un « carton jaune » contre le Ghana parce qu’il ne prenait pas suffisamment de mesures pour lutter contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), et elle lui a accordé 6 mois pour remédier à toutes ces insuffisances : si un « carton rouge » devait être attribué, l’interdiction d’importation de poisson ferait partie des sanctions. Le 27 juin 2014, la CE a accordé au pays 6 mois supplémentaires pour améliorer la situation parce qu’elle a jugé que « des progrès concrets étaient réalisés en termes de satisfaction de leurs obligations ».

Ceci intervient dans le contexte de la finalisation de l’accord de partenariat économique (APE) intérimaire en Afrique de l’Ouest en juillet 2014. Sur ce sujet, la publication Fish Trade and Industry News du Forum Fisheries Agency’s (FFA) des îles du Pacifique rapporte que le Ghana, un grand producteur de thon en conserve, avait fourni « une moyenne annuelle de 4,6 % des importations totales de l’UE au cours de la période de 2009 à 2013 (y compris le commerce intra-UE) ». Le FFA souligne également que l’APE intérimaire donnera « un coup de fouet à une entreprise conjointe de conserverie de thon au Ghana impliquant le géant de la vente de thon taïwanais FCF et la société coréenne verticalement intégrée Silla. L’usine devrait transformer environ 20 000 tonnes métriques par an de thon en conserve, dont 25 pour cent seront capturés par des thoniers canneurs ».

Ben Czapnik, pour la newsletter Passerelles de l’ICTSD, a également déclaré concernant l’APE intérimaire qu’« en dépit de l’importance du marché régional pour les produits transformés du Ghana, ce pays serait peu susceptible d’envisager sérieusement un résultat quelconque qui entraînerait une perte d’accès à l’Europe pour des produits de base importants » – y compris le thon.

Par ailleurs, le ministre ghanéen de la pêche et de l’aquaculture a également annoncé que toutes les importations de tilapia devraient être interdites, avec effet immédiat, « pour aider à créer un marché pour les pêcheurs locaux de poisson et encourager une production plus importante ». Plus de 90 % de la demande annuelle de poisson du Ghana (880 000 tonnes) sont couverts par les importations, pour un coût de 2 milliards de dollars par an. Cependant, Ventures Africa a déclaré que le syndicat des travailleurs agricoles du Ghana (GAWU) relaie les craintes ghanéennes concernant l’absence d’un accord alternatif pour satisfaire aux besoins de consommation en cas de pénurie massive de l’offre qui sera créée par l’interdiction.

Commentaire éditorial

À l’instar de nombreux pays ACP, les secteurs de la pêche et de l’aquaculture sont des secteurs cruciaux pour la sécurité alimentaire, les recettes d’exportation et les emplois du pays. Au Ghana, la transformation du thon (thon en conserve /longes de thon) pour exportation vers l’UE est d’abord et avant tout une source majeure d’emplois qui exigent peu de qualifications. Ces exportations vers l’UE ne sont pas uniquement dépendantes de l’accès en franchise de droits actuel mais du respect d’autres exigences, notamment celles découlant de la réglementation INN de l’UE. Les efforts entrepris par le Ghana pour relever les défis en matière de pêche INN sont les bienvenus et opportuns car, dans le cadre de la mise en œuvre de la réglementation INN, la décision de l’UE d’interdire ou non les importations de poisson pourrait être prise à la fin de l’année, sur la base de l’évaluation des changements introduits à la législation et aux pratiques ghanéennes. Toutefois, afin de maximiser la création d’emplois dans le secteur, la décision récente d’interdire les importations de tilapia pour promouvoir la pisciculture locale est tout aussi importante. Une décision récente similaire a été prise au Nigeria à l’égard des importations de petits pélagiques (qui forment également une part significative des importations de poisson du Ghana). 

Aborder le problème de l’offre d’aliments pour poissons

11 octobre 2014

Le dernier rapport Globefish sur la farine de poisson et l’huile de poisson souligne qu’une demande croissante des secteurs utilisant une alimentation d’origine animale (aquaculture/agriculture) a maintenu la pression sur les prix de la farine de poisson et de l’huile de poisson. Les déclins de la production mondiale, dus aux restrictions de pêche et aux mauvaises conditions climatiques, ont fait grimper les prix à des niveaux record en 2013. Pour réduire leur dépendance à l’égard des captures de poisson sauvage, les producteurs de farine de poisson remplacent de plus en plus le poisson par une matière première végétale, en particulier le soja. Toutefois, la durabilité de la production de soja (en raison des organismes génétiquement modifiés/OGM et des problèmes de déforestation) et la concurrence pour la consommation humaine soulèvent quelques problèmes.

Une autre piste est également envisagée dans l’aquaculture africaine. Une étude récente a examiné le cas de la production de tilapia d’élevage en Afrique, où la demande est élevée mais la production locale insuffisante. L’étude souligne que l’élevage intensif de tilapia augmente en Afrique subsaharienne, au Ghana en particulier, où les bassins d’élevage industriel de tilapia à grande échelle se développent pour satisfaire à une demande locale croissante. Dans des pays tels que le Zimbabwe, la Zambie et l’Ouganda, « la production commerciale de tilapia commence à avoir un impact sur les marchés locaux et régionaux ».

Bien que les petits agriculteurs continuent d’utiliser une alimentation animale artisanale produite à partir de divers déchets et sous-produits, ces élevages intensifs de tilapia dépendent de l’alimentation commerciale importée, principalement basée sur la farine de poisson. Compte tenu de la hausse des prix de la farine de poisson, la demande en alimentation animale alternative locale de qualité ne cesse d’augmenter. La production locale et durable d’insectes est une possibilité dans la région, compte tenu des conditions environnementales favorables, les larves de mouche ayant été identifiées comme une source durable et précieuse de protéines pour les systèmes de production d’élevage, y compris le poisson. La production de larves de mouche peut se faire à faible coût à partir de diverses sources de déchets organiques (fumier, fruits ou légumes en décomposition, déchets d’abattoir, etc.) et peut être incorporée dans l’alimentation pour poissons en tant que principale source de protéine animale pour l’alimentation du tilapia. Des essais seront réalisés en 2014 et 2015 au Ghana.

Commentaire éditorial

Dans les pays africains important des quantités importantes de poisson, tels que le Ghana et le Nigeria, l’aquaculture pourrait potentiellement jouer un rôle plus important pour approvisionner les marchés locaux. À ce jour, l’alimentation pour poisson importée basée sur la farine de poisson a été un des principaux facteurs limitant le développement de l’aquaculture (y compris l’élevage d’espèces non carnivores telles que le tilapia, parce que les qualités intrinsèques de la farine de poisson garantissent un régime équilibré pour le poisson, permettant une croissance rapide). Le développement de sources alternatives durables de protéines pour l’alimentation des poissons est une question primordiale qu’il convient d’aborder pour poursuivre le développement de l’aquaculture.

Le cadre OMC pour l’accès aux marchés internationaux pour les produits de la pêche et de l’aquaculture

11 octobre 2014

Des délégués de 11 pays ont participé à un atelier conjoint organisé par la FAO et Info-SAMAK sur un « cadre OMC pour l’accès aux marchés internationaux pour les produits de la pêche et de l’aquaculture ». Une présentation de la FAO, mise à disposition avec le rapport, s’est penchée sur les « Mesures liées au marché dans le commerce du poisson pour promouvoir les pêcheries durables ». Elle s’est d’abord penchée sur les raisons pour lesquelles les labels écologiques des produits de la mer s’étaient développés, à savoir :

  • une sensibilisation et une demande du public croissantes pour des produits de la mer durables ;
  • une intégration verticale le long de la chaîne de responsabilité, qui facilite la documentation et l’étiquetage ;
  • les exigences mondiales des distributeurs pour des produits de la mer durables, pour attirer des consommateurs/augmenter la part de marché ;
  • le durcissement des exigences juridiques des pays importateurs.

Quatre facteurs communs ont été identifiés dans les marchés des labels écologiques (principalement les marchés de l’UE et des États-Unis) :

  • les consommateurs dans ces pays sont « sensibilisés à l’environnement » ;
  • ces pays ont des populations urbaines actives très importantes ;
  • les chaînes de supermarché (plutôt que les marchés aux poissons traditionnels) dominent la distribution au détail de produits de la mer de ces pays ;
  • les structures de consommation sont basées sur peu d’espèces de produits de la mer, avec une préférence pour les produits de la mer transformés qui se prêtent aux labels écologiques.

À cette fin, la Global Seafood Sustainability Initiative (GSSI) est présentée. Cette initiative rassemble plus de 30 parties prenantes (entreprises privées de produits de la mer, ONG et agences gouvernementales telles que la GIZ) ; et la FAO fournit une expertise technique et siège au Comité de pilotage. La GSSI a pour mission de « proposer un outil de référenciation commun, cohérent et universel pour les programmes de certification et d'écolabellisation des produits de la mer comestibles ; à augmenter le niveau de confiance des consommateurs dans la filière d'approvisionnement, à promouvoir des pratiques de pêche durable et à encourager l'amélioration des programmes de certification de ces produits ».

L'outil de référenciation de la GSSI utilise comme critères minimums les directives de la FAO relatives à la certification et le cadre d'évaluation pour l'aquaculture, les normes ISO, etc. Des études pilote seront menées concernant les systèmes de certification sélectionnés en 2014. La publication de l’outil de référenciation est prévue pour 2015.

Commentaire éditorial

Si le cadre de l’OMC joue un rôle majeur pour régir le commerce international de poisson, notamment le commerce de poisson UE-ACP, d’autres aspects tels que l’utilisation des labels écologiques (et les exigences de traçabilité connexes) sur les marchés (par ex. les États-Unis et l’UE) constituent à la fois des opportunités et des obstacles devant être abordés par les pays ACP exportant du poisson. Il est recommandé aux parties prenantes des pays ACP intéressés de rejoindre l’initiative actuelle de la GSSI afin que leurs préoccupations spécifiques soient dûment prises en compte dans le développement de cet outil de référenciation mondial pour les labels écologiques des produits de la mer.