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Note de synthèse - mise à jour 2013 : Secteur du coton

19 décembre 2013

1.         Contexte et principaux enjeux

Alors que les États-Unis restent le premier exportateur de coton au monde, en 2012/13, la politique chinoise dans le secteur cotonnier a commencé à avoir une emprise de plus en plus importante sur les marchés mondiaux du coton, les réserves chinoises représentant 63 % des stocks mondiaux. En même temps, les politiques menées par la Chine ont soutenu le prix mondial du coton en 2012/13, en rendant les importations de coton avantageuses aux yeux des industriels chinois du textile.

Alors que les pays ACP comptent pour seulement 5 % de la production mondiale de coton, ce produit garde une importance économique et sociale considérable dans les principaux pays producteurs de coton – le Bénin, le Burkina Faso, le Tchad et le Mali, connus comme le groupe C4. La production de coton en Afrique de l’Ouest devrait augmenter très fortement en 2012/13 (+ 41 %), cette hausse devant se poursuivre en 2013/14, mais à un rythme moins élevé.

En Afrique orientale et australe, un déclin de 21 % de la production de coton est attendu en 2012/13, et cette baisse devrait se poursuivre en 2013/14, suite à un recul de la production à travers la région.

Alors que la Chine fournit le niveau de soutien au secteur cotonnier le plus élevé dans l’ensemble, l’UE continue à fournir le plus haut niveau de soutien par tonne de production. L’extension des marges de manœuvre pour l’allocation des aides couplées, comme prévu par l’accord politique de juin 2013 sur la réforme de la PAC, pourrait avoir comme conséquence une hausse des aides couplées pour le secteur cotonnier dans les sept années à venir. Ce développement n’augure rien de bon pour les discussions sur la question du coton dans le cadre de l’OMC, qui sont restées au point mort en 2012/13. Cependant les États-Unis demeurent au cœur de quelque développement qui pourrait se produire sur la question du coton à l’OMC.

Étant donné l’influence des politiques chinoises sur le fonctionnement des marchés mondiaux du coton, une priorité pour les pays ACP pourrait être d’intégrer davantage la Chine dans les discussions sur le coton à l’OMC, afin de faire réellement avancer cette question.

2.         Récents développements

2.1       Développements des marchés mondiaux du coton en 2012/13

En 2012/13, la production mondiale de coton sera encore supérieure à la consommation, suivant la même tendance observée depuis la campagne 2010/11. À 26,39 millions de tonnes, elle marque toutefois un léger recul par rapport à 2011/12. En ce qui concerne la consommation, après deux années de baisse, la reprise a été vive en 2012/13 avec une progression de 7 % à 28,78 millions de tonnes. Si elle diminue chez le premier consommateur mondial, la Chine, ce déclin est partiellement compensé par une hausse en Inde, au Bangladesh, en Turquie et au Pakistan. Pour la troisième année consécutive, les stocks mondiaux de coton sont en augmentation, dont près de 60 % se situent en Chine. Et la même tendance se dessine encore pour 2013/14, la part de la Chine grimpant à 64 %. Quant à la production mondiale, elle devrait à nouveau reculer d’un peu plus de 5 % pour atteindre 24,95 millions de tonnes, selon le Comité consultatif international du coton (CCIC), avec une baisse aux États-Unis (les superficies sont en recul de 17 % par rapport à l’année dernière), en Chine, au Brésil et en Australie, et une stabilité en Inde, au Pakistan et en Ouzbékistan. Quant à la consommation, elle ne progresserait que d’un peu plus de 2 % et atteindrait 24,33 millions de tonnes.

Contrastant avec l’extrême volatilité en 2010 et 2011 où les prix du coton sont passés en l’espace de six mois de 85 centimes de $US la livre à un niveau historique de 243 centimes, puis redescendus brutalement, depuis le démarrage de la campagne 2012/13, les cours sont moins volatils. Démarrant en août à 81,65 centimes la livre, l’indice Cotlook A a fluctué entre 80 et 85 centimes jusqu’en février, moment auquel il a commencé à s’apprécier pour atteindre un sommet de près de 99 centimes en mars, puis a diminué en avril-mai, se situant autour de 90 centimes, avant de remonter mi-juin à 96 centimes. Globalement, les prix ont fluctué sur l’ensemble de la période dans une fourchette comprise entre 80 et 99 centimes, et selon le CCIC ils s’établiront en moyenne à 88 centimes la livre en 2012/13, soit 12 centimes de moins qu’en 2011/12. La moindre volatilité des cours a conduit à une réduction des ruptures de contrats. Ainsi, 52 contrats ont fait l’objet d’un arbitrage de l’International Cotton Association (ICA) au premier semestre 2013 contre 135 au premier semestre 2012 (et 247 sur l’année entière, pendant laquelle le record de 2011 de 242 demandes d’arbitrage avait été dépassé). Au regard des fondamentaux du marché – offre supérieure à la demande et importants stocks – les cours sont relativement élevés, en raison de la politique chinoise, qui sera encore déterminante dans l’orientation des cours du coton en 2013 et 2014. Avec plus de 60 % des stocks détenus en Chine, selon l’USDA, en 2013/14, le ratio stocks-utilisation hors Chine est relativement tendu.

La Chine a renouvelé en 2012/13 son programme de soutien aux producteurs en garantissant un prix minimum d’achat au-dessus du prix mondial et en reconstituant sa réserve nationale. Alors qu’au début de la campagne 2012/13 les stocks en Chine avaient presque triplé pour s’élever à plus de 6 millions de tonnes, ils ont encore progressé, et pourraient atteindre 10 millions de tonnes au début de 2013/14, avec des importations certes en recul, mais plus importantes qu’anticipé, selon une estimation de l’USDA de juin 2013. En effet, les importations s’élèveraient à environ 4,3 millions de tonnes, contre 5,2 millions de tonnes en 2011/12, alors qu’une partie de la réserve chinoise a été mise en vente depuis janvier. Les ventes devraient s’arrêter fin juillet.

L’Empire du Milieu n’a toutefois pas caché ces dernières semaines qu’il réfléchissait à modifier sa politique actuelle (voir article Agritrade «  Changements imminents dans la politique cotonnière chinoise ? », 15 juillet 2013). En effet, outre le soutien aux producteurs, la priorité de la politique chinoise était jusqu’à présent de stabiliser le marché, mais le prix payé, notamment par ses industries textiles, est peut-être trop élevé.

Perspectives du coton en 2022

Quelle sera la physionomie du marché du coton dans 10 ans ? Pour la première fois, la FAO et l’OCDE dans les « Perspectives agricoles 2013-2022 » font des projections pour le coton. Si la Chine devrait maintenir sa place de premier consommateur et les États-Unis de premier exportateur, des évolutions sensibles marqueront cette décennie. La consommation devrait continuer de croître mais à un rythme plus faible que la moyenne de long terme de l’ordre de 1,7 % par an, une croissance impulsée à hauteur de 7 % par l’Inde. Elle ne dépassera le record atteint en 2004, soit 26,7 millions de tonnes, qu’en 2022. La production devrait progresser moins vite que la demande avec une baisse sensible en Chine et une augmentation en Inde et au Pakistan. Quant aux échanges, ils devraient baisser. Toutefois, la part des PMA d’Afrique subsaharienne dans les exportations mondiales devrait croître et, selon les projections, ces pays dépasseraient l’Inde, celle-ci devenant le deuxième exportateur mondial, derrière les États-Unis. Autre changement, la part de la Chine dans les importations mondiales diminuera de moitié au profit de pays comme le Bangladesh et le Vietnam. Enfin, concernant les prix sur la période 2013-2022, les projections montrent qu’ils progresseront de 47 % par rapport à la période 2000-2009, se situant en moyenne autour de 1 935 $ la tonne, mais seront moins attractifs que ceux du blé ou du maïs.

2.2       La question du coton à l’OMC : développements en 2012/13

Les dernières consultations sur l’aide au développement dans le secteur du coton à l’OMC sont sans appel. « Le 21 juin 2013, le groupe “Coton-4” et d’autres producteurs d’Afrique subsaharienne ont dit déplorer l’absence de progrès dans les négociations visant à réduire les subventions en faveur du coton et à ouvrir les marchés. » Il faudra donc attendre la prochaine conférence ministérielle de l’OMC en décembre prochain, à Bali. Dans le cadre de la préparation de cette conférence, le groupe C4 devrait présenter une nouvelle proposition.

Le peu d’avancées constatées sur le dossier coton s’inscrit dans le cadre plus global du cycle de Doha dont les négociations sont au point mort.

En outre, pour les subventions aux filières cotonnières des pays occidentaux, les discussions sont en cours pour la réforme de la PAC ainsi que celles sur la nouvelle Farm Bill (voir section 2.3 ci-dessous).

Du côté des États-Unis, faute d’accord l’année dernière entre les deux chambres du Congrès, la loi agricole 2008-2012, qui a mobilisé plus de 288 milliards $US, a été étendue jusqu’au 30 septembre 2013, date où une nouvelle loi doit être votée pour la période 2013-2018. Si certains contours de la future Farm Bill semblent définis comme son montant, d’environ 939 milliards $US sur 10 ans, la forte réduction des subventions et l’accroissement des assurances récolte, le Sénat et la Chambre des représentants s’opposaient toujours début juillet, en particulier sur le programme des coupons alimentaires (food spams). Afin de tenter de parvenir à un accord, les Républicains de la Chambre des représentants ont proposé de séparer le projet de loi en deux parties et ont adopté le 11 juillet la loi amputée des food spams. Cela suffira-t-il pour avoir un vote favorable du Sénat et, en dernier ressort, l’accord de la Maison Blanche ?

Spécifiquement pour le coton, la réforme porte sur la fin des paiements directs et le développement des programmes d’assurance récolte. Ces derniers seraient complétés par le Stacked Income Protection Plan for Producers of Upland Cotton (STAX), couvrant des pertes moindres et proposé par le National Cotton Council (NCC), et non remis en cause le 11 juillet. Le NCC estime que le STAX, tout en étant bénéfique pour les cotonculteurs, est une base « pour régler définitivement le différend avec le Brésil à l’OMC ». Un différend qui est suspendu jusqu’à la nouvelle Farm Bill avec toutefois un accord pour un versement des États-Unis en faveur du Brésil de 147,3 millions $US par an. Le Brésil pourra prendre des mesures de rétorsion s’il estime que la loi ne répond pas à ses attentes. Des études de l’ICTSD montrent que, sous certaines conditions, le système d’assurance récolte couplé au STAX pourrait augmenter les dépenses américaines sur le coton dans un contexte de prix bas.

Quant à la Chine, les subventions à son secteur cotonnier, en forte hausse, ont jusqu’à présent, et particulièrement durant la campagne en cours, contribué à maintenir les cours à un niveau relativement élevé et à stabiliser le marché. Or, depuis une dizaine d’années, on avait observé une corrélation négative entre l’indice A de Cotlook et le montant des subventions, surtout américaines et européennes. Néanmoins, une note d’information du CCIC et de l’ICTSD, suggère que, si la Chine intégrait le coton dans son programme d’accès au marché en franchise de droits et sans contingent (DFQF) pour les pays les moins avancés (PMA), le coton africain gagnerait en compétitivité par rapport aux autres origines car exempt de droits de douane. La Chine impose, en effet, des droits de douane au coton importé compris entre 5 % et 40 % au-delà du contingentement de 894 000 tonnes par an fixé dans le cadre des obligations de l’OMC.

Si les négociations au sein de l’OMC sur la dimension commerciale du dossier coton n’évoluent pas, les pays africains constatent une amélioration s’agissant de l’aide reçue. En mai 2013, le montant de l’aide directement liée au secteur du coton décaissée s’élève à 453 millions $US, dont 321,3 millions en projets terminés et 131,7 millions de projets en cours. Elle est en hausse de 64 millions $US par rapport à décembre 2012. Toutefois, si on observe une amélioration des décaissements, elle est jugée encore trop faible par les Africains (ratio décaissements totaux sur engagements de 36 % sur les 365,6 millions $US engagés). En ce qui concerne l’aide au développement dans le domaine de l’agriculture et des infrastructures connexes, la valeur totale des engagements est de 6,9 milliards $US, en hausse de 1,9 milliard $US par rapport à décembre.

Les Africains ont souligné l’intérêt de la coopération Sud-Sud et remercié plus particulièrement la Chine (à noter que l’aide de la Chine n’est pas comptabilisée ci-dessus). En 2012, le Brésil a signé un accord de partenariat avec la FAO d’un montant de 20 millions $US sur quatre ans pour transférer son savoir-faire sous forme d’assistance technique et de formation sur les meilleures pratiques de culture et de commercialisation du coton aux producteurs des pays en développement. De même, l’Inde a alloué une enveloppe de 5 millions $US sur la période 2012-2014 au programme d’assistance technique sur le coton africain, dont le siège est à Ouagadougou.

2.3       Développements dans le secteur cotonnier européen en 2012/13

Depuis la réforme de 2006, la production de coton en Europe a fortement diminué, se situant au niveau du milieu des années 1980, soit à environ 300 000 tonnes, c’est-à-dire 1 % de la production mondiale.

Toutefois, en 2011/12, la production a grimpé de près de 40 % pour atteindre 347 500 tonnes. En Grèce, laquelle représente environ 80 % de la production européenne de coton, elle a progressé de 42 % par rapport à la campagne précédente, pour s’établir à 290 000 tonnes, avec un accroissement des superficies récoltées (+ 20 %) et à un meilleur contrôle des parasites. Pour 2012/13, à superficie inchangée, la production devrait être moindre, estimée à 265 000 tonnes, car les rendements seront plus faibles en raison de mauvaises conditions météorologiques et d’une moindre utilisation des engrais. Globalement, pour la Grèce et l’Espagne, la production baisserait de près de 7 %, à 325 000 tonnes.

Pour 2013/14, les premières estimations donnent un recul important des superficies et donc de la production dans les deux pays. Celle-ci passerait en dessous des 300 000 tonnes, à 255 000 tonnes, soit un recul de plus de 20 % par rapport à 2012/13. En Grèce, les agriculteurs ont opté pour le blé dur et le maïs, surtout dans la région de Thessalie, des cultures dont le coût de production est moins élevé que le coton et dont les prix ont bondi, passant de 0,22 €/kilo en juillet 2012 à 0,26 €/kilo en février 2013. De même en Espagne, les agriculteurs se sont tournés vers le maïs, plus rémunérateur. D’ores et déjà, le prix du coton, qui varie chaque année, avait baissé à 42 € les 100 kilos contre 56,35 € les 100 kilos en 2012/13. En outre, les paiements dits de l’article 69, qui viennent s’ajouter aux paiements couplés, ne sont pas renouvelés pour 2013/14.

En termes de subventions, les pays européens reçoivent l’aide moyenne par livre produite la plus importante au niveau mondial. Pour 2011/12, le CCIC estime que les subventions directes à la production cotonnière en Grèce se sont élevées à 266 millions $US, contre 280 millions en 2010/11, soit 43 centimes de $US/livre de fibre produite (70 centimes en 2009/10). Pour l’Espagne, elles représentent environ 89 millions $US, contre 93 millions en 2010/11, soit 67 centimes de $US/livre de fibre (98 centimes en 2010/11).

Quant à la réforme de la PAC, le dialogue interinstitutionnel dans l’UE est susceptible de déboucher sur une plus grande flexibilité dans le déploiement des mesures politiques de la PAC par les États membres individuels. Des craintes particulières ont été exprimées concernant la plus grande flexibilité dans l’utilisation du soutien couplé, par exemple dans le secteur du coton, où cela pourrait saper les efforts ACP déployés par le groupe C4 de pays africains producteurs de coton pour obtenir des disciplines plus strictes sur le soutien au secteur du coton via l’OMC (voir article Agritrade «  L’état d’avancement actuel des négociations pour la réforme de la PAC », 17 juin 2013).

2.4       Développements dans les secteurs cotonniers ACP en 2012/13

Afrique de l’Ouest et du Centre

On assiste à une renaissance du coton en Afrique de l’Ouest et du Centre, qui confirme en 2012/13 la reprise amorcée de la production lors de la précédente campagne. Les superficies ont augmenté de 33 %, la production de 41 % et les exportations de 42 %. Des conditions météorologiques globalement favorables, une politique volontariste avec des prix aux producteurs élevés et un maintien des subventions aux intrants ainsi que de meilleures pratiques ont permis cette relance. Pour 2013/14, les sociétés cotonnières ont renouvelé des objectifs ambitieux et maintenu des prix aux producteurs incitatifs, en dépit d’une légère baisse par rapport à 2012/13.

Le Burkina Faso est redevenu le premier producteur de la région avec 630 000 tonnes produites en 2012/13, soit 51 % de plus qu’en 2011/12. Suite au problème de la longueur de la soie, les superficies en OGM de la Sofitex ont été réduites à 60 % et un plan semencier a été mis en place conjointement avec la recherche agronomique burkinabè, les producteurs et la firme Monsanto. Parallèlement, une campagne de sensibilisation a été lancée pour inciter les paysans à recourir à la fumure organique, en plus des engrais minéraux, le coton OGM ayant besoin de plus d’engrais. Pour 2013/14, le Burkina Faso s’est fixé pour objectif une production de 730 000 tonnes.

En Côte d’Ivoire, la reprise se confirme avec une production de 340 000 tonnes en 2012/13, en hausse de plus de 30 % par rapport à 2011/12, et le pays ambitionne en 2013/14 de la porter à 400 000 tonnes, soit à un niveau proche de celui d’avant la crise politique. L’agriculture est un secteur prioritaire pour le gouvernement, et le coton, cultivé dans le nord du pays, en fait partie. Un Conseil de gestion de la filière coton-anarcarde a été mis en place, chargé de mettre en œuvre la réforme du secteur. À l’instar de la réforme du cacao de janvier 2012, les producteurs de coton sont au cœur de la réforme, avec la volonté qu’ils obtiennent une meilleure rémunération de la commercialisation de leur produit. Ainsi, les producteurs recevront 60 % du prix international. Conjointement, un fonds spécial de développement sera créé pour accroître la production à 600 000 tonnes en 2016. Un fonds de lissage, à l’instar de celui en place au Burkina Faso, est envisagé.

Au Bénin, la campagne 2012/13 a été agitée et s’est soldée par une reprise en main par l’État de la filière en écartant Patrice Talon, un homme clé dans le coton, présent à tous les stades de la filière et notamment dans l’importation d’intrants. Pris de court, l’État n’a pas pu pallier la désorganisation de la filière et la production, attendue à 600 000 tonnes, n’a atteint que 250 000 tonnes, en hausse toutefois par rapport aux 175 000 tonnes de 2011/12. Au Togo, l’objectif des 100 000 tonnes n’a également pas été atteint, la production s’étant stabilisée à 80 000 tonnes. Au Mali, en dépit de la guerre, la CMDT a consolidé ses acquis avec une production de 453 000 tonnes, soit un montant sensiblement identique à la campagne précédente. Pour 2013/14, l’objectif est de réaliser 522 000 tonnes. Globalement, pour les six pays de l’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Mali, Sénégal et Togo), la production d’environ 1,8 million de tonnes en 2012/13 (+ 28 % par rapport à 2011/12) progresserait encore de 20 % pour atteindre 2,1 millions de tonnes en 2013/14.

En Afrique centrale, on observe une nette reprise de la production cotonnière au Tchad, impulsée par un plan de relance du secteur cotonnier sur la période 2012-2016. Dés le démarrage de la campagne 2012/13, la société cotonnière du Tchad, CotonTchad, a engagé plusieurs mesures comme la collecte et le paiement du coton graine de 2011/12, la commande d’intrants, etc. Ainsi, la production a progressé de 50 % à 120 000 tonnes. Au Cameroun, si les inondations ont amputé la production, elle progresse tout de même de 19 % en 2012/13, à 220 000 tonnes. Pour 2013/14, la Sodecoton ambitionne de réaliser 260 000 tonnes. L’entreprise a procédé aux premiers essais de coton génétiquement modifié en 2012. Une réflexion est en cours pour mettre en place une Association interprofessionnelle du coton du Cameroun, théoriquement effective en 2013, pour formaliser les relations entre la Sodecoton et la Confédération nationale des producteurs de coton du Cameroun (CNPC-C).

Tableau I : Évolution de la production de fibre de coton en Afrique subsaharienne (en milliers de tonnes)

  2011/12 2012/13* 2013/14*
Afrique francophone 717 1 011 912
Bénin 75 158 151
Burkina Faso 174 260 92
Cameroun 78 100 151
Côte d’Ivoire 113 140 133
Mali 187 229 211
Afrique anglophone 633 503 461
Mozambique 61 37 27
Nigeria 63 57 56
Tanzanie 120 97 80
Zambie 110 74 65
Zimbabwe 142 119 107

Source : Comité consultatif international du coton (CCIC), mars 2013.

* Estimation.

Afrique orientale et australe

Contrairement à l’Afrique de l’Ouest et du Centre, la production de coton en Afrique de l’Est et australe est en net recul en 2012/13 et la tendance pour 2013/14 n’est pas à la reprise. La production a chuté de 22 % et les superficies de 17 % entre 2011/12 et 2012/13. Une conséquence du déroulement de la campagne 2011/12 où la tension était vive entre producteurs et égreneurs dans plusieurs pays et où la baisse des prix a détourné une partie des paysans du coton.

En Tanzanie, le système d’agriculture contractuelle, au cœur de la réforme du secteur du coto, semble s’enliser dans des conflits. Alors que certains dysfonctionnements existaient déjà en 2012 (voir article Agritrade «  L’agriculture contractuelle renforce le fonctionnement de la chaîne d’ap... », 4 juin 2012), ils ont pris une tournure politique en 2013. La Tanzania Cotton Association (TCA) accuse certains politiques et des acheteurs de coton de faire campagne contre l’agriculture contractuelle, en appelant par exemple les agriculteurs à ne pas vendre leur coton en dessous d’un certain prix, une situation qui contribuerait à la baisse possible de près de 40 % de la production de coton cette année. Avec des superficies en retrait de 26 % par rapport à 2012 et un moindre rendement, la production pourrait ne s’élever qu’à 240 000 tonnes en 2013 contre 354 000 tonnes la campagne précédente.

En Zambie, la production est aussi attendue en baisse, autour de 30 %, à un niveau d’environ 175 000 tonnes (275 000 tonnes en 2011/12), avec une baisse des superficies de 27 % – les agriculteurs se tournant vers d’autres cultures, en particulier le soja – et des conditions météorologiques peu favorables. Pourtant, en 2012/13, le gouvernement avait, pour la première fois, inclus le coton dans le Farmer Input Support Programme (FISP), un des éléments qui ont contribué à développer la production de maïs.

Au Zimbabwe, on observe la même tendance avec une réduction de 25 % environ, à 260 000 tonnes.

Au Mozambique, la chute est plus brutale, d’environ 46 %, à 110 000 tonnes, contre 184 000 tonnes en 2011/12, une campagne où la production été multipliée par près de trois, selon le Cotton Institute. Toutefois, les investissements dans l’industrie se poursuivent. En mai 2013, la China Africa Cotton Mozambique Ltd (CACM) a démarré la construction d’une usine d’égrenage d’une capacité de 30 000 tonnes à Subue, dans la province de Sofala. Et le singapourien Olam, qui a conclu des accords de production avec 70 000 producteurs et a récemment adhéré à la Better Cotton Initiative, compte poursuivre ses investissements dans la production agricole au Mozambique. Il a démarré en mai la construction d’une troisième usine d’égrenage. La compagnie japonaise Nitura envisagerait de construire un complexe textile et, afin de l’alimenter en coton, de mettre en valeur 4 000 hectares dans le district de Malem, selon le Mozamiban Cotton Institute.

En Angola, le gouvernement a engagé un programme de rénovation, de modernisation et d’expansion de son secteur textile. Il concerne trois entreprises : Textang II, pour laquelle la rénovation est en cours et devrait s’achever fin 2013, Africa Textil et Satec, qui seront les suivantes. Dans ce cadre, la Japanese Bank of International Cooperation (JBIC) a accordé une ligne de crédit de 1 milliard $US. Parallèlement, la culture du coton est encouragée, en particulier dans les provinces de Malanje et de Kwanza Sul, afin d’alimenter en matières premières ces industries. Le programme de relance de la production cotonnière vise des superficies de 100 000 hectares et une production de 40 000 tonnes de fibres.

3.         Implications pour les pays ACP

3.1       La nécessité de maintenir la pression concernant les subventions au secteur cotonnier

Globalement, avec la baisse des cours du coton en 2011/12, les subventions se sont inscrites à la hausse, estimées par le CCIC à 4,5 milliards $US sur 2011/12, soit 17 centimes de $US la livre, contre 1,4 milliard $US en 2010/11. Parmi les dix pays ayant accordé des subventions, la Chine arrive loin devant avec 3,1 milliards $US, puis viennent les États-Unis avec 819 millions $US, la Turquie (428 millions $US) et l’Union européenne (355 millions $US).

Les subventions continuent d’entraver le commerce et d’impacter négativement les pays ACP. Si l’impact des subventions des pays de l’OCDE a été quelque peu atténué par la politique menée par la Chine ces deux dernières années, les États-Unis sont le premier pays exportateur mondial de coton et entrent directement en concurrence avec les pays ACP. Comme le souligne l’ICTSD, en 2012/13, les pays en développement représenteront 96 % de l’utilisation de coton, 97 % des importations et 81 % de la production, soit une part dominante, mais seulement 52 % des exportations mondiales. Et les pays africains, qui sont preneurs de prix (price takers), sont en concurrence directe sur les marchés d’exportation avec des pays développés. Les subventions impactent donc la compétitivité du coton africain, et ce d’autant plus que, avec le déplacement des exportations de l’Europe vers l’Asie, l’Afrique a perdu ses avantages en termes de coûts et de délais face à des pays comme l’Inde ou l’Australie. Toutefois, les pays ACP doivent aussi améliorer leur compétitivité.

3.2       La nécessité de suivre les développements liés à la politique chinoise

Un changement dans la politique chinoise – soutien à ses producteurs de coton et constitution d’une réserve nationale – pourrait avoir des conséquences néfastes sur les pays ACP. Depuis deux ans, la politique de la Chine a été incontestablement un facteur de soutien des prix internationaux à un niveau au-dessus des fondamentaux. Une remise en cause de cette politique pourrait provoquer une baisse des prix. Des premiers signes de changement apparaissent, la Chine ayant expérimenté en avril le paiement de subventions directes aux producteurs de coton dans le Xinjiang, afin de tenter d’enrayer le déclin de la production.

Comme les pays ACP ne sont pas protégés et exportent la majeure partie de leur production sous la forme de coton brut, l’impact serait immédiat. Toutefois, pour 2013/14, la Chine a renouvelé sa politique d’achat du coton domestique à un prix de 20 400 yuans (2 504 €) la tonne, et les pays africains de la zone Franc ont maintenu, bien qu’en légère baisse, des prix aux producteurs relativement élevés. Enfin, la production chinoise est attendue en baisse, et plus généralement la production mondiale en 2013/14. Avec une consommation en hausse, on atteindrait presque l’équilibre entre l’offre et la demande. Demeure toutefois des stocks très importants, qui progresseront encore.

3.3       La nécessité pour les pays ACP d’assurer un accès préférentiel sur les marchés tiers pour leur textile

La bataille a été rude pour renouveler la disposition du tissu de pays tiers de la Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique (AGOA), qui expirait le 30 septembre 2012. Elle a été finalement adoptée en août 2012, pour une durée de trois ans, après une intense campagne de lobbying et plus d’une année d’atermoiements. Si l’AGOA reste en vigueur jusqu’en 2015, une remise en cause de cette disposition aurait fortement affecté l’industrie textile africaine, notamment celle du Kenya, du Malawi, du Lesotho ou de la Tanzanie. Elle autorise, en effet, les PMA bénéficiant de l’AGOA de s’approvisionner en fil et en tissu sur le marché mondial, et d’exporter les vêtements produits à partir de ces intrants en franchise de droits sur le marché américain. Or, 86 % des exportations africaines de vêtements vers les États-Unis dépendent de cette disposition. Et d’ores et déjà, les difficultés du processus de renouvellement ont impacté négativement en 2012 les flux commerciaux de vêtements entre l’Afrique et les États-Unis.

La bataille recommencera avec les négociations sur le renouvellement en 2015 de l’AGOA et la disposition sur le tissu de pays tiers. Lors de sa tournée en Afrique en juin 2013, le président Obama a affirmé son soutien à l’AGOA et indiqué chercher les modalités pour reconduire l’accord et l’améliorer.

3.4       S’attaquer aux problèmes liés aux normes de durabilité

Tout a commencé par le coton biologique dans les années 1990. Mais depuis le milieu des années 2000 sont apparues de nouvelles initiatives – Fairtrade International (FLO), Cotton Made in Africa (CMIA), et Better Cotton Initiative (BCI) – qui se développent et semblent trouver un certain écho auprès des consommateurs et des grandes marques de fabricants de textile, bien que le coton labellisé ne constitue encore aujourd’hui qu’un segment de marché étroit (l’ensemble des cotons labellisés ne représente que 2,2 % de la production mondiale de coton en 2011/12). Ces initiatives, différenciées dans leur approche mais aussi par la zone géographique, ont pour objectifs de rendre le coton plus durable, socialement responsable et d’améliorer les revenus des producteurs.

Toutefois, pour le coton biologique, les deux dernières campagnes montrent un déclin de la production mondiale avec toujours une domination de l’Inde (75 % de la production mondiale). Plusieurs pays, et notamment la Tanzanie, premier producteur africain de coton biologique (environ 75 % de la production du continent) et dont la production de coton (y compris conventionnelle) est en déclin cette année, émettent des réserves. Les rendements sont moindres, et la prime, lorsqu’elle est payée, ce qui n’est pas toujours le cas, ne compense pas les pertes de rendement.

De nombreux producteurs rencontrent aussi des difficultés à vendre leur coton sur le marché. Contrairement à l’Inde ou à la Turquie, les pays africains ne disposent pas d’une filière industrielle textile intégrée et ils sont, comme pour le coton conventionnel, preneurs de prix. Sans une sécurisation des ventes par des contrats sur le moyen terme, les producteurs ne s’y retrouvent pas. Le coton Faitrade est le seul à offrir un prix minimum et une prime au producteur, mais semble stagner, une grande part du coton Faitrade étant aussi biologique. Pour ces deux cotons, le coût de la certification est aussi élevé. Coût qui n’existe pas dans les deux autres initiatives, CIMIA et BCI, qui ont fortement progressé en 2010/11 et 2011/12. Toutefois, dans aucune des initiatives, le producteur n’est assuré de vendre son coton et demeure, avec des coûts additionnels, tributaire de l’offre et de la demande.

Alors que la mise en conformité avec ces normes de durabilité pourrait permettre d’offrir aux producteurs de coton africains des primes sur les prix et des débouchés intéressants, il semble qu’un tel résultat ne soit pas automatique. Si les producteurs ACP veulent continuer dans cette voie, il conviendra de veiller à ce que les primes sur les prix compensent effectivement les rendements plus faibles du coton biologique, par exemple, ainsi que les coûts de certification. Par ailleurs, des efforts devront être faits sur la sécurisation des ventes et des débouchés. Dans ce cadre, le développement de filières textiles dans les pays producteurs de coton pourrait permettre aux producteurs d’être moins dépendants des marchés extérieurs et de leurs évolutions. 

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