Inquiétudes concernant l’impact des accords commerciaux de l’UE sur le commerce des États-Unis avec l’Afrique
02 février 2014
En novembre 2013, le département américain de l’agriculture (USDA) a publié un rapport sur l’impact des accords commerciaux de l’UE sur le commerce agroalimentaire des États-Unis avec l’Afrique du Sud et la région dans son ensemble. Le rapport de l’USDA affirme que « les accords bilatéraux entre l’Union européenne et les pays d’Afrique subsaharienne exercent une concurrence plus importante sur la part de marché des exportations agricoles américaines vers la région ». Dans le cas de l’Afrique du Sud, le rapport précise que les « avantages tarifaires actuels de l’UE créent des barrières supplémentaires aux exportations américaines », après la pleine mise en œuvre des engagements de libéralisation commerciale de l’Accord sur le commerce, le développement et la coopération (ACDC) UE-Afrique du Sud en 2012.
D’après l’analyse de l’USDA, « depuis son entrée en vigueur en 2000, le commerce entre l’UE et l’Afrique du Sud s’est considérablement amélioré grâce à l’ACDC ». En effet, entre 2007 et 2012 (la dernière phase de la mise en œuvre des engagements d’élimination tarifaire), « les exportations agricoles de l’UE vers l’Afrique du Sud sont passées de 990 millions de dollars à un peu plus de 2 milliards de dollars ».
Ce n’est cependant que la pointe de l’iceberg des soucis des États-Unis, étant donné la conclusion des Accords de partenariat économique (APE) et des APE intérimaires à la fin de l’année 2007. Les négociations d’APE en cours dans la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) devraient « élargir l’accès au marché de l’UE pour le porc, les produits laitiers, le blé, les aliments transformés et plus encore ».
Tableau 1 : Préférences tarifaires de l’UE sur les exportations vers l’Afrique du Sud et valeur du commerce en 2012
Produit | Différence tarifaire la plus élevée (%) | Valeur des exportations de l’UE (millions $US) | Valeur des exportations des États-Unis (millions $US) | Pourcentage moyen de différence tarifaire |
Chapitre 2 | ||||
Volaille congelée mais pas en morceaux | 82 | |||
Morceaux de volaille congelée et abats | 37 | 265 | 31,1 | 7,0 ° |
Chapitre 20 | ||||
Ananas | 55 | |||
Concentré de tomates | 37 | |||
Champignons | 37 | |||
Olives | 25 | 71,2 | 9,2 | 18,4 |
Chapitre 22 | ||||
Vin, etc. | 25 | |||
Alcool avec ABV de 80 %+ | 317c /litre | 452,0 | 29,3 | 16,8 |
Chapitre 21 | ||||
Levures préparées | 30 | 152,7 | 33,4 | 10,6 |
Chapitre 7 | ||||
Ail | 325 c/kg to max. 37 | |||
Pommes de terre | 30 | 19,0 | 6,5 | 9,9 |
Chapitre 12 | ||||
Farines | 20 | |||
Caroubes | 20 | 29,7 | 10,6 | 6,9 |
Chapitre 8 | ||||
Goyaves, mangues, mangoustans | 35 | |||
Fruits et noix | 20 | 20,0 | 15,2 | 5,8 |
Chapitre 10 | ||||
Millet | 5 | |||
Sorgho | 3 | 41,4 | 31,4 | 1,2 |
Chapitre 4 | ||||
Lait aromatisé, babeurre, etc. | 450 c/litre to max 96% | |||
Lactosérum | 450 c/litre to max 96% | 106,5 | 29,3 | 4,1 |
Miel | 22 |
* Les sauvegardes spéciales sont également appliquées contre les exportations de volaille
des États-Unis vers l’Afrique du Sud.
Source : South Africa Customs and Excise Tariffs and Global Trade Atlas, cité dans USDA GAIN Report,
26 novembre 2013 (voir ci-dessous), tableau 1.
Le rapport affirme également que « l’UE a toujours une part de marché bien plus importante que les États-Unis, partiellement en raison de l’accès préférentiel ». La situation est jugée particulièrement grave dans le secteur de la volaille où, en plus des désavantages tarifaires conventionnels, les exportations américaines sont également sujettes à des droits anti-dumping de 940 cents US/kg sur les morceaux de volaille congelée.
Tableau 2 : Différences tarifaires sur la volaille entre les États-Unis et l’UE, 2013
Code SH | Description | Droit de douane général (%) | Droit de douane de l’UE |
0207.12.20 | Carcasses | 31 | Nul |
0207.12.90 | Autres | 82 | Nul |
0207.14.10 | Morceaux désossés | 12 | Nul |
0207.14.20 | Abats | 30 | Nul |
0207.14.90 | Autres | 37 | Nul |
Source : South Africa Customs and Excise Tariffs, cité dans USDA GAIN Report, 26 novembre 2013
(voir ci-dessous), tableau 2.
Commentaire éditorial
L’importance de la position concurrentielle des exportateurs américains sur le marché sud-africain réside dans le fait que l’Afrique du Sud et les membres de l’Union douanière de l’Afrique australe (SACU) sont les seuls pays ACP dans lesquels les engagements réciproques de libre-échange à l’égard de l’UE ont été totalement mis en œuvre (à l’exception des marchandises de l’UE exportées via Walvis Bay). Certains craignent aux États-Unis que cela ne soit un avant-goût de la position concurrentielle dans laquelle les exportateurs américains pourraient se trouver lorsque les engagements d’élimination tarifaire réciproques envers l’UE au titre des APE et des APE intérimaires seront totalement mis en œuvre.
Les craintes américaines trouvent un écho chez les gouvernements africains au vu de l’examen/renouvellement imminent de la loi Africa Growth and Opportunities Act (AGOA), qui devrait expirer en septembre 2015 (voir article Agritrade « L’Afrique et les États-Unis discutent de l’avenir de l’AGOA », 11 octobre 2013). Les exportateurs agroalimentaires des États-Unis pourraient exercer une certaine pression pour obtenir un nouvel accord AGOA englobant des éléments de réciprocité dans les engagements tarifaires consentis, en particulier lorsque les gouvernements africains individuels ont un APE en place avec l’UE.