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Note de synthèse - mise à jour 2013 : Différenciation des produits

10 décembre 2013

1.         Contexte et principaux enjeux

Le principal objectif des stratégies de différenciation des produits est de garantir au producteur des primes sur les prix pour des catégories spécifiques de produits. La forme la plus répandue de ces stratégies est le travail sur l’image de marque des produits, en parallèle de campagnes publicitaires à grande échelle. Cependant, au cours des 20 dernières années, des stratégies plus génériques basées sur les caractéristiques perçues de produits particuliers sont apparues.

Dans le contexte de l’UE, cette tendance doit être considérée dans le cadre de la réforme de la Politique agricole commune (PAC) et la mise en place d’une base permettant de maintenir et renforcer la valeur de la production agroalimentaire européenne alors que le commerce des produits agricoles se libéralise. Elle doit également être appréhendée au regard de revenus disponibles croissants et d’une segmentation accrue des marchés des produits alimentaires. Au-delà d’un certain niveau de revenus, lorsque les consommateurs disposent de davantage de moyens, ils ne consomment pas plus de nourriture pour autant, mais ils consomment différemment, puisqu’ils sont même prêts à payer plus pour des produits ayant des caractéristiques et attributs particuliers. Ces attributs de qualité peuvent être liés au processus de production, au fonctionnement de la chaîne d’approvisionnement, ou encore à l’origine géographique ou à d’autres caractéristiques de qualité spécifiques.

Dans certains secteurs, la demande pour de tels produits, qui n’était au départ qu’un marché de niche, devient un marché de grande consommation. Ceci peut cependant poser des problèmes pour les producteurs dans les cas où les nouvelles normes de qualité deviennent la norme du secteur, les primes sur les prix pouvant s’en trouver réduites ou même disparaître, alors que ces dernières sont l’objectif même de ces stratégies de différenciation.

Dans le contexte ACP, la différenciation des produits doit être considérée au regard du processus d’érosion des préférences auquel font face les exportateurs ACP sur le marché traditionnel de l’UE, et sur lequel les primes sur les prix dont ils bénéficiaient se sont amoindries. Par ailleurs, les revenus disponibles croissants sur les marchés ACP locaux en Afrique et ailleurs dans les pays en développement jouent aussi un rôle, créant une demande nouvelle pour des produits différenciés. La différenciation des produits basée sur la qualité (par ex. les produits bovins namibiens Natures Reserve et le rhum caribéen Authentic Caribbean Rum) peut représenter une voie intéressante pour le repositionnement des producteurs ACP en réponse à l’érosion des préférences.

Dans un contexte mondial, la différenciation des produits doit être considérée à la lumière de l’émergence de l’approvisionnement global et de l’importance croissante des produits portant des marques de multiples distributeurs. On peut voir cette tendance comme un facteur d’affaiblissement des bénéfices tirés des produits de marque traditionnels, les consommateurs étant de plus en plus conscients que les produits de marque classiques et les produits de marque de distributeurs pourraient bien être fabriqués dans la même usine, selon les mêmes standards.

Au sein de l’UE, la différenciation des produits basée sur la qualité est une composante importante de la PAC réformée et présente de multiples facettes. Par exemple, en 2012/13, des initiatives ont été lancées au niveau national pour différencier la production locale sur la base de critères de qualité. Ces initiatives s’ajoutent aux nombreux autres programmes et mesures mis en place par l’UE pour différencier les produits européens des produits importés sur des critères de qualité.

Nombre de ces initiatives ont des répercussions sur les démarches des producteurs ACP visant à repositionner leurs produits agricoles et alimentaires sur les marchés d’exportation.

Le développement continu des normes privées complique encore davantage le marché des produits différenciés de qualité. Dans certains segments de marché tels que le commerce équitable, le rôle croissant des firmes multinationales dans les ventes de grande consommation soulève des questions importantes en lien avec l’intégrité des systèmes de labellisation et la répartition des revenus le long de la chaîne d’approvisionnement, en conformité avec les attentes des consommateurs de produits du commerce équitable.

2. Récents développements

2.1       Débats politiques et tendances au sein de l’UE impactant les marchés de produits différenciés

La valeur croissante des indications géographiques au sein de l’UE

Dans le cadre du processus de réforme de la PAC, l’UE a développé un système d’indications liées à l’origine géographique (IG), en tant que moyen de différenciation des produits permettant de garantir des primes sur les prix aux producteurs européens. Alors que ce système est déjà bien établi dans le secteur vinicole grâce à des appellations d’origine spécifiques à certaines régions (par ex. Champagne), une protection juridique plus systématique est maintenant donnée à ces appellations, notamment au niveau international. Par ailleurs, le système est appliqué à un nombre croissant de produits agricoles et denrées alimentaires.

En mars 2013, l’UE a publié une évaluation de la valeur de la production des produits agricoles et denrées alimentaires, ainsi que des vins et spiritueux qui sont protégés par une IG dans l’UE (équivalente à 54,3 milliards d’euros en 2010), et de la valeur totale des primes associées à l’utilisation des IG. L’évaluation a estimé le « taux moyen de la valeur des primes » pour les « produits agricoles et denrées alimentaires » à 1,55. Cela signifie que les « produits agricoles et denrées alimentaires » protégés par une IG ont attiré un prix en moyenne une fois et demie supérieur à celui d’un même volume de produits non protégés par une IG dans la même catégorie de produits (par ex. le jambon). Concernant les vins et les spiritueux, ce chiffre était encore plus élevé (2,75 et 2,57 respectivement) (voir article Agritrade «  Des entreprises françaises tentent de déposer la marque de thé “rooibos”... », 12 mai 2013).

Ces résultats mettent en évidence les primes sur les prix potentielles pouvant être obtenues grâce aux appellations IG et à une promotion et une commercialisation actives de produits IG sur certains segments de marché. 

La valeur des ventes des produits agricoles et denrées alimentaires protégés par une IG croît plus rapidement que celle des vins et spiritueux, la valeur des exportations de ces produits atteignant 1 milliard d’euros en 2010. Au 1er janvier 2010, environ 867 produits agricoles et denrées alimentaires bénéficiaient d’une protection IG dans l’UE, alors que 285 dossiers de candidature étant encore en cours d’examen fin février 2013. Pourtant, les produits agricoles et denrées alimentaires représentaient encore moins de 30 % de la valeur totale des ventes de produits protégés par une IG réalisées par les producteurs européens.

Alors que les IG sont potentiellement intéressantes pour les exportateurs ACP en termes de primes sur les prix, cela nécessite la mise en place de cadres juridiques au niveau national pour la protection des IG. Ce qui peut être assez coûteux si un nombre limité de producteurs bénéficie de ce type de certification (alors que dans l’UE cela concerne des milliers de producteurs) et pourrait ne pas être justifié si d’autres systèmes de protection des produits différenciés par la qualité, similaires mais moins coûteux, sont disponibles. Cependant, garantir une protection efficace avec d’autres mécanismes (comme les marques, par exemple) peut également être coûteux, et une évaluation au cas par cas est certainement appropriée dans ce cadre. Ainsi, les gouvernements ACP font face à des choix difficiles lorsqu’il s’agit de décider comment défendre au mieux leurs intérêts en matière de commerce et de propriété intellectuelle.

Une tentative par une entreprise française d’enregistrer le nom « Rooibos » sous une marque en 2012/13 a montré les contraintes juridiques et réglementaires auxquelles les pays ACP sont confrontés pour protéger leurs intérêts en matière commerciale et de propriété intellectuelle. Depuis sa création en 2005, le Conseil sud-africain du Rooibos examine la possibilité d’une protection IG mais a finalement estimé que « la loi sud-africaine ne convenait pas aux indications géographiques », alors que « les règles de l’UE exigent qu’une indication géographique soit enregistrée d’abord au niveau national avant que l’UE ne l’accepte ». En conséquence, le Conseil sud-africain du Rooibos a décidé d’enregistrer Rooibos sous une marque collective, en espérant que cela suffira à garantir une protection IG sur le marché de l’UE (voir article Agritrade «  Illustration des contraintes juridiques et réglementaires sur la protect... », 3 juin 2013).

Inversement, les producteurs jamaïcains de café Blue Mountain utilisent traditionnellement le régime de protection des marques mais ont récemment entamé « des procédures pour enregistrer le café jamaïcain Blue Mountain sous une IG avec le Bureau jamaïcain de la propriété intellectuelle ».

Évolutions du cadre commercial et réglementaire de l’UE pour les produits issus de l’agriculture biologique 

Depuis le 1er juillet 2012, les importations de certains produits – qui sont certifiés par des agences de certification reconnues et importés de certains pays spécifiques avec lesquels une équivalence de certification est reconnue par l’UE – ne nécessitent plus une autorisation d’importation. Les accords d’équivalence permettent à la fois de réduire les coûts de certification des exportations de produits biologiques vers l’UE et de simplifier le processus d’importation vers l’UE, donnant ainsi un avantage concurrentiel aux pays ayant obtenu le statut (voir article Agritrade «  De nouvelles exigences en matière d’étiquetage biologique et une nouvell... », 6 août 2012).

Un nombre croissant de gouvernements des pays tiers ont conclu ou cherchent à conclure un accord d’équivalence avec l’UE. En juin 2012, la Chine, qui pourrait devenir un exportateur majeur de produits biologiques, a signé un accord avec l’UE pour « entamer des négociations pour un accord de reconnaissance mutuelle dans le domaine des produits alimentaires biologiques » (voir article Agritrade «  Discussions entamées avec la Chine concernant des normes biologiques com... », 9 juillet 2012).

Dans certains secteurs (par ex. celui de la banane pour lequel le Pérou cherche à conclure un accord d’équivalence pour les produits biologiques), cela pourrait avoir des conséquences importantes pour les exportateurs ACP ciblant les mêmes segments de marché.

Une nouvelle réglementation européenne concernant le logo pour les produits biologiques, dont l’objectif est de créer plus de transparence pour les produits emballés et certifiés biologiques, est entrée en vigueur en juillet 2012. La nouvelle norme va  faciliter le renforcement des contrôles nationaux des organismes de certification, afin d’éliminer la labellisation frauduleuse des produits biologiques (notamment en Allemagne). Cependant, cette nouvelle règle doit être considérée sur fond de craintes que les produits biologiques importés n’affectent les bénéfices environnementaux d’une production biologique localisée.

Le 15 janvier 2013, la CE a lancé une consultation publique sur le régime futur des produits biologiques, examinant :

  • les possibilités de simplification ;
  • l’impact du logo européen pour les produits biologiques ;
  • la manière de garantir que les produits biologiques échangés mondialement sont effectivement contrôlés et vérifiés.

Ces consultations vont alimenter les « propositions [de la CE] pour un cadre juridique et politique pour l’agriculture biologique en Europe », prévu pour la fin de l’année 2013 (voir article Agritrade «  L’UE lance une consultation publique sur la production biologique », 24 février 2013).

Développements dans les règlements de l’UE pour les produits du commerce équitable

En mai 2012, le Cour européenne de justice a confirmé que « les considérations de nature environnementale ou sociale » peuvent être incluses dans les appels d’offres dans le cadre de marchés publics. Les appels d’offres doivent spécifier les critères à atteindre et non pas le label indiquant que ces critères ont été atteints. Le règlement est considéré comme ouvrant de nouveaux marchés importants pour les producteurs du commerce équitable, les marchés publics pouvant être un moyen efficace de sensibiliser les consommateurs sur le commerce équitable (voir article Agritrade «  De nouvelles opportunités pour les producteurs du commerce équitable », 2 juillet 2012).

Les développements en Nouvelle-Zélande – où la Commission du commerce soutient que les systèmes de certification propres à certaines entreprises, tels que le label « Ethical Choice » de Dole, risquent d’induire en erreur les consommateurs et violent par conséquent la Loi néozélandaise sur le commerce équitable – font apparaître des questions règlementaires qui n’ont pas encore été traitées au niveau de l’UE.

2.2       Développements dans les principaux segments de marché des produits différenciés

Le marché des produits biologiques

Dans l’UE, la production intérieure ne parvient toujours pas à satisfaire la demande en produits biologiques, cette dernière augmentant bien plus rapidement que la production. Ceci est particulièrement vrai en Allemagne, laquelle a été moins affectée par le ralentissement économique. Cette tendance crée des opportunités de marché potentielles intéressantes pour les exportateurs ACP de produits biologiques.

Cependant, ils font face à une concurrence croissante sur les marchés biologiques européens de la part des pays en développement avancés dans le cadre des nouveaux accords de libre-échange. Cette concurrence pose la question des bénéfices à long terme de la certification biologique pour les exportateurs ACP ciblant le marché européen, puisque les importations accrues en provenance de pays non ACP pourraient entraîner une diminution des primes sur les prix dont les producteurs bénéficient actuellement, alors que les coûts de conformité et de certification resteraient inchangés.

Avant de prendre des initiatives à grande échelle en matière de production biologique pour desservir les marchés européens, les producteurs ACP doivent évaluer le marché avec attention et envisager l’adoption de mesures pour réduire, à chaque fois que cela est possible, les coûts d’accès au marché biologique européen.  

Au-delà du marché européen, le marché mondial des produits biologiques croît fortement. Alors que 90 % de la demande pour les produits biologiques certifiés provient de l’UE et des États-Unis, la croissance est forte au Brésil, la demande chinoise a été multipliée par quatre en cinq ans, et une hausse de 20 % est attendue en Asie dans les trois années à venir.

Lors d’une conférence internationale en Zambie en mai 2012, il a été souligné que des bénéfices importants pourraient être tirés d’une expansion de la production certifiée biologique en Afrique, et les participants ont appelé à l’élaboration d’un Plan d’action pour une production biologique africaine (voir article Agritrade «  Les exigences biologiques deviennent de plus en plus strictes », 18 juin 2012).

Cependant, à mesure que les revenus augmentent et que les modes de consommation évoluent, la demande en produits biologiques en Afrique se développe. Desservir ces marchés locaux implique souvent des coûts moindres puisque des systèmes d’auto-certification sont établis. Au sein de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), par exemple, les agriculteurs biologiques au Kenya, en Ouganda et en Tanzanie opèrent généralement dans le cadre de Systèmes de garantie participative (SGP), basés sur les exigences des normes applicables aux produits biologiques d’Afrique de l’Est (East African Organic Products Standard), et suivent un processus de revue interne par les pairs afin de garantir la conformité avec les normes (voir article Agritrade «  Un rapport souligne l’augmentation de la production biologique à destina... », 13 juin 2013).

La production biologique se développe non seulement en Afrique, mais aussi dans le Pacifique et les Caraïbes, la production biologique certifiée étant vue comme un moyen d’accéder à des segments de marché pour lesquels les producteurs bénéficient de primes sur les prix (voir article Agritrade «  L’agriculture biologique au Vanuatu : la voie à suivre », 18 mai 2013).

Cependant, garantir des primes sur les prix, qui alors assureront des bénéfices nets aux producteurs, au travers de la certification biologique (ou d’autres formes de différenciation des produits) n’est absolument pas automatique. Comme dans d’autres domaines de différenciation des produits, la garantie de primes sur les prix et de bénéfices nets nécessite une multiplicité d’actions complémentaires, et pas seulement la certification.

Une tendance notable ces dernières années a été la « double certification » des produits biologiques/commerce équitable. Par exemple, entre 2009/10 et 2010/11, le volume des bananes portant une double certification a augmenté de 35 % et le pourcentage des bananes équitables également certifiées biologiques est passé de 25 % à 39 % des ventes totales de bananes équitables. Cette tendance est considérée comme un moyen de reconsolider les primes sur les prix et les bénéfices nets pour les producteurs.

Le marché des produits du commerce équitable

Malgré les difficultés économiques actuelles auxquelles font face les principaux marchés de l’OCDE, les ventes au détail de produits certifiés équitables ont montré une résistance remarquable et ont même augmenté de 2 % en 2011, pour atteindre des ventes totales de 6,6 milliards $US. Par ailleurs, un éventail croissant de produits certifiés commerce équitable est maintenant disponible (voir article Agritrade «  Les ventes du commerce équitable continuent de croître malgré le ralenti..., 28 avril 2013).

Des programmes ont été lancés afin d’augmenter davantage les ventes de détail au Royaume-Uni, le plus grand marché pour les produits du commerce équitable, notamment en favorisant l’utilisation croissante de matières premières issues du commerce équitable dans la fabrication de produits transformés (voir article Agritrade «  Fairtrade lance une stratégie pour augmenter les ventes du commerce équi... », 26 mai 2013). Cependant, il conviendra d’être attentif à la répartition des coûts et des bénéfices liés à la certification le long de la chaîne d’approvisionnement résultant de cette stratégie.

À l’heure où les coûts des intrants augmentent, il est tout à fait possible que l’on assiste à une expansion de la valeur des ventes au détail des produits du commerce équitable, alors que les bénéfices nets obtenus par les producteurs diminuent. Il sera important de traiter cette question si l’on veut maintenir l’intégrité des produits labellisés commerce équitable dans l’esprit des consommateurs.

Ceci est particulièrement important étant donné la décision du principal distributeur britannique de vendre dorénavant des bananes en provenance des îles Canaries afin de réduire son empreinte carbone, ce qui laisse présager une concurrence croissante dans le panier du consommateur entre les différents types de produits différenciés par la qualité.

Comme dans le secteur agricole biologique, les ventes de produits commerce équitable sur les marchés émergents (notamment en Afrique du Sud et au Kenya) sont en forte croissance.

Cependant, comme cela a été reconnu à la Convention africaine du commerce équitable en novembre 2012, « malgré des systèmes agroalimentaires tels que le commerce équitable, la plupart des producteurs africains reçoivent toujours les plus faibles revenus dans toute la chaîne, en raison du manque d’accès à des infrastructures publiques et des ressources financières suffisantes et à des prix du marché actualisés ». Selon le gestionnaire de l’Oromia Coffee Farmers Cooperative Union, « ce n’est pas le manque de ressources naturelles mais l’absence d‘élaboration de mécanismes d’échange qui nous rend de plus en plus pauvres » (voir article Agritrade «  Les producteurs africains du commerce équitable soulignent la nécessité... », 4 janvier 2013).

Selon certains, le mouvement du commerce équitable devra se concentrer de plus en plus sur l’identification de solutions répondant au fonctionnement inégal des mécanismes d’échange dominants. Au vu du rôle croissant des firmes multinationales dans les chaînes d’approvisionnement du commerce équitable, ceci semble particulièrement pertinent.

Les grandes firmes multinationales sont de plus en plus impliquées dans la transformation et le traitement de produits du commerce équitable pour des raisons commerciales qui leur sont propres. L’achat par American Sugar Refiners (ASR) d’une participation majoritaire dans Belize Sugar Industry (BSI) en est un bon exemple. S’assurer un accès direct aux 6 000 planteurs indépendants certifiés commerce équitable offre un approvisionnement sécurisé en sucre labellisé commerce équitable à Tate and Lyle Sugars (TLS), filiale d’ASR (voir article Agritrade «  La branche commerce équitable a été un facteur décisif du rachat de BSI... », 2 décembre 2012).

Face à la concurrence croissante sur le marché britannique en 2008, TLS a décidé de convertir la totalité de sa gamme de sucre pour la consommation directe, alors qu’en octobre 2012 l’entreprise annonçait un nouveau partenariat avec IMCD Benelux, un acheteur et distributeur d’ingrédients alimentaires, afin de répondre à la demande croissante des fabricants européens en sucre certifié commerce équitable. Augmenter les ventes de sucre équitable représente ainsi une composante essentielle des stratégies de repositionnement sur les marchés des entreprises.

Ce type de développement peut constituer un défi pour le mouvement du commerce équitable, en particulier dans un contexte où les relations commerciales intra-entreprises réduisent la transparence dans la formation des prix de base.

Des questions similaires se posent au sein des chaînes d’approvisionnement du commerce équitable du Malawi et de la Zambie, étant donné l’implication indirecte d’Associated British Foods à toutes les étapes de la chaîne, depuis les domaines agricoles et les sucreries, à travers la société de négoce, jusqu’aux raffineurs/distributeurs européens.

Les problèmes liés au processus interne de formation des prix et au prix de base payé aux planteurs de canne à sucre par tonne de sucre de canne livrée aux sucreries vont probablement prendre une importance plus grande au plan économique que la simple question des primes sur les prix.

L’entrée des distributeurs « discount » tels que Aldi ou Lidl dans les ventes au détail de produits issus du commerce équitable fait aussi émerger de nouveaux défis pour la filière, cette tendance intensifiant la concurrence en matière de prix sur les marchés du commerce équitable, au détriment des producteurs.

L’impact des pratiques des supermarchés sur les niveaux des prix est déjà visible sur le marché britannique de la banane, où la guerre des prix entre les enseignes de supermarchés a conduit à une baisse générale des prix des bananes, puis des bananes issues du commerce équitable (voir article Agritrade «  Tendance divergentes sur les marchés américain et européen de la banane... », 24 juin 2012).

En juin 2012, cette question a fait l’objet d’une pétition envoyée à la CE par une coalition d’organisations de consommateurs appelant à ce que le code de bonnes pratiques proposé par l’UE et régissant les relations des distributeurs avec leurs fournisseurs s’applique aussi aux relations avec les fournisseurs étrangers (voir article Agritrade «  Les préoccupations en matière de durabilité se généralisent dans le sect... », 29 juillet 2012).

En octobre 2012, des appels se sont fait entendre pour une meilleure traçabilité dans l’utilisation d’intrants issus du commerce équitable dans les produits alimentaires transformés. Selon des informations relayées par les médias, les barres chocolatées labellisées commerce équitable pourraient ne pas contenir de cacao durable, car les fèves sont mélangées pendant le transport et la transformation. Actuellement, rien n’oblige les fabricants à garder le cacao issu du commerce équitable séparé du cacao conventionnel, les entreprises achetant simplement le droit à utiliser les labels du commerce équitable pour un volume spécifique d’un produit et les agences de certification garantissant qu’un volume équivalent est fourni par des exploitations se conformant aux normes requises. L’utilisation de matières premières provenant effectivement du commerce équitable dans les barres chocolatées individuelles labellisées en tant que telles n’est pas exigée.

La question de la traçabilité se pose non seulement pour la labellisation commerce équitable mais également pour les intrants labellisés durables, et devrait gagner en importance dans les années à venir. Les demandes pour davantage de traçabilité pourraient avoir des implications sur les coûts au détriment des revenus nets des producteurs primaires.

L’émergence de systèmes de labels et de certification privés qui ne sont pas vérifiés de manière indépendante pourrait compliquer les problèmes rencontrés dans les segments de marché du commerce équitable, beaucoup de ces nouveaux systèmes n’offrant pas de garanties de prix aux producteurs.

Parallèlement, de nombreuses initiatives ont été lancées pour promouvoir la production et la commercialisation de produits issus du commerce équitable. Celles-ci vont du lancement du Fonds d’accès au commerce équitable (Fairtrade Access Fund) en mars 2012 et du Fonds d’investissement pour le commerce agricole africain (Africa Agriculture Trade Investment Fund) d’un montant de 85 millions € par la Banque allemande de développement KfW jusqu’à l’annonce, en août 2012, d’une allocation supplémentaire de 4,56 millions $NZ (environ 2,73 millions €) au Fairtrade ANZ (Australie et Nouvelle-Zélande) « afin d’aider à libérer le potentiel d’exportation des petites exploitations agricoles du Pacifique » (voir article Agritrade «  Des fonds supplémentaires pour la promotion de la production du commerce... », 8 octobre 2012). 

Cet essor des financements pourrait non seulement contribuer à augmenter la production du commerce équitable dans les pays ACP mais également aider les producteurs ACP du commerce équitable à se repositionner face aux évolutions des tendances de marché, avec pour certains marchés une érosion du différentiel de prix entre les produits certifiés commerce équitable et ceux qui ne sont pas certifiés (à l’image, par exemple, du marché britannique de la banane équitable).

Le marché des produits durables

Un certain nombre de développements majeurs ont eu lieu en 2012/13 en matière de certification durable. En juin 2012, « toutes les grandes chaînes de supermarchés, sociétés de négoce et ONG aux Pays-Bas » ont signé une convention les engageant à garantir que « tous les fruits et légumes frais dans les supermarchés néerlandais seront produits de manière durable » d’ici à 2020 (30 % en 2014 et 50 % en 2015). La convention couvre virtuellement l’ensemble du secteur des fruits et légumes (90 % du volume de la grande distribution). La définition de la durabilité dans le programme repose sur les normes existantes (telles que Rainforest Alliance et Commerce équitable) (voir article Agritrade «  Les préoccupations en matière de durabilité se généralisent dans le sect... », 29 juillet 2012).

Alors que cela devrait augmenter la demande en fruits et légumes certifiés durables de manière considérable, ce programme coordonné par la Sustainable Trade Initiative pourrait en fait être à double tranchant pour les producteurs ACP, en posant de nouveaux défis.

Le premier défi a trait à la capacité des fournisseurs ACP à satisfaire la demande croissante pour les fruits et légumes produits de manière durable. Certains gouvernements non ACP soutenant une expansion de leurs exportations de fruits et légumes vers l’UE via la conclusion de nouveaux accords de libre-échange, les fournisseurs ACP pourraient affronter une concurrence accrue sur ces marchés. 

Le second défi est susceptible de se poser dans les secteurs où la certification durable devient la norme du secteur, sans que les coûts d’une telle certification soient répartis de manière équitable le long de la chaîne d’approvisionnement. Les fournisseurs ACP pourraient ainsi devoir supporter une hausse des coûts afin d’approvisionner le marché de l’UE, et par ailleurs subir une pression à la baisse sur les prix, du fait de la concurrence accrue entre distributeurs appliquant les mêmes normes de durabilité.

En juin 2012 a été lancé par le Conseil irlandais de l’alimentation (Irish Food Board – Bord Bia) le système de certification des pratiques commerciales durables appelé « Origin Green ». L’objectif du système est d’accroître la demande des consommateurs pour les aliments produits de manière durable grâce à un étiquetage clair qui permet aux consommateurs de faire des choix informés. Selon des informations de presse, « un programme international de communication ciblé est déjà en cours pour informer sur Origin Green et sur l’Irlande en tant que source d’aliments produits de manière durable » (voir article Agritrade «  Le Conseil irlandais des denrées alimentaires introduit un nouveau label... », 16 décembre 2012).

Les systèmes nationaux d’étiquetage de la durabilité, tels que celui du Conseil irlandais, « Origin Green », cherchent à répondre à l’intérêt croissant des consommateurs pour l’impact environnemental des processus de production à travers lesquels les aliments et boissons consommés arrivent à leur table. Le système est conçu explicitement pour différencier les aliments et les boissons irlandais des produits des pays tiers.

Suite à cette initiative, des réactions se sont manifestées, dénonçant une montée d’éco-protectionnisme. Lors de la troisième assemblée générale sur la coopération africaine en matière d’accréditation (African Accrediation Cooperation), le ministre sud-africain du Commerce et de l’Industrie a tiré la sonnette d’alarme concernant la montée d’un « éco-protectionnisme », opérant « derrière l’excuse de lutter contre le changement climatique ». Alors que des inquiétudes ont été exprimées quant à « l’application possible de taxes aux frontières sur les importations ayant une empreinte carbone plus élevée que les mêmes produits fabriqués localement », ces développements en 2012 suggèrent que cet éco-protectionnisme viendrait plutôt des allégations figurant sur l’étiquette sous les différents systèmes ou encore des initiatives des entreprises visant à différencier leurs propres produits spécifiques des versions génériques des mêmes produits sur la base de critères environnementaux (voir article Agritrade «  L’huile de palme durable prête à être développée à condition de relever... », 9 décembre 2012). Ceci soulève des questions relatives à l’étiquetage et à la réglementation.

Face aux nombreuses normes différentes de durabilité qui existent, le projet sud-africain « Sustainability Initiative of South Africa » (SIZA) a lancé en octobre 2013 une initiative pour remplacer les audits et normes multiples par un processus d’audit unique visant à réduire les coûts de certification et améliorer les bénéfices nets pour les producteurs primaires tirés de la production de biens certifiés durables. Ce système de vérification indépendant piloté dans le secteur des fruits repose sur la reconnaissance mutuelle des audits parmi les distributeurs locaux et internationaux (voir article Agritrade «  L’Afrique du Sud établit une norme unique en matière de commerce éthique », 4 janvier 2013).

Parallèlement, au Kenya, des initiatives visant à promouvoir la certification environnementale de cultures telles que les fruits et légumes, les fleurs coupées, le coton, le thé, le cacao et le café sont en cours, en réponse aux tendances de marché émergentes. Plusieurs de ces initiatives sont conduites au niveau sectoriel : par exemple, la Kenya Tea Development Authority a obtenu la certification Rainforest Alliance pour 42 de ses 65 usines de thé (voir article Agritrade «  L’agriculture écologique jugée comme étant l’avenir de l’agriculture kén... », 23 septembre 2012).

Ces initiatives en Afrique doivent être considérées à la lumière des initiatives sectorielles telles que la Sustainable Trade Initiative aux Pays-Bas sur l’approvisionnement en fruits et légumes, ainsi que des initiatives des firmes multinationales ayant défini des objectifs pour leurs achats et pour l’utilisation de matières premières certifiées durables.

Une tendance notable en 2012/13 a été celle des entreprises qui se sont engagées à augmenter leur approvisionnement en cacao et en huile de palme certifiés durables. En ce qui concerne le cacao, de grandes entreprises telles que Hershey, Ferrero et Mars (mais pas Nestlé) ont pris l’engagement de s’approvisionner auprès de sources certifiées durables pour 100 % de leur cacao d’ici à 2020, alors que des entreprises comme Barry Callebaut se sont engagées à augmenter leur approvisionnement en cacao durable. Ces initiatives sont mises en œuvre à la fois unilatéralement et collectivement sous l’égide de la World Cocoa Foundation. Des engagements similaires ont été pris pour l’approvisionnement en huile de palme durable.

Cependant, comme souligné dans une étude publiée en mars 2012 par l’International Institute for Environment and Development, afin de participer à ces systèmes de certification durable, les producteurs « doivent payer le plus gros des coûts de certification (à la fois les coûts directs tels que les frais et indirects tels que les coûts d’établissement des structures nécessaires pour satisfaire aux exigences de traçabilité) ». Alors que de tels coûts sont normalement considérés comme un moyen d’obtenir des primes sur les prix, la question suivante se pose : que se passe-t-il pour les primes sur les prix lorsque la certification durable devient la norme du secteur ? (voir article Agritrade «  La certification est utile mais profite aux “agriculteurs moins pauvres” », 10 juin 2012). Ceci représente un défi de plus en plus essentiel dans le cadre des systèmes de certification durable.

Les initiatives de différenciation basées sur la qualité des produits

Alors que les systèmes d’étiquetage de type IG, commerce équitable, agriculture biologique et durable constituent les segments les plus importants du marché des produits différenciés, ils ne représentent pas les seuls moyens pour les producteurs ACP de différencier leurs produits.

Dans le secteur caribéen du rhum, un label régional de qualité (Authentic Caribbean Rum) a été développé afin de soutenir la transition des exportations de rhum en vrac vers les exportations de rhum de marque différencié par la qualité, en bouteille. Ce programme soutenu par l’UE a permis une progression remarquable des exportations de rhum en bouteille de haute valeur ciblant les segments de marché du rhum de première qualité.

En 2012, cependant, il est devenu évident qu’aux États-Unis des allègements fiscaux finançaient une augmentation importante de la production de rhum à Porto Rico et dans les îles Vierges des États-Unis (équivalant à 80 % de la consommation annuelle américaine de rhum), ce qui constitue une menace directe pour les ventes ACP caribéennes de rhum en vrac, un segment de marché très sensible aux prix et qui est essentiel aux recettes globales du secteur caribéen du rhum. La production de rhum subventionnée des territoires caribéens américains est considérée comme un réel danger pour la base de production sur laquelle la production de rhum en bouteille différencié par la qualité a été développée dans les pays ACP des Caraïbes.

Cet épisode souligne les limites des stratégies de différenciation des produits spécifiques à un secteur dans les pays ACP, visant à renforcer la position concurrentielle des producteurs, en comparaison avec les implications financières des programmes de subventions des États de l’OCDE.

En Namibie, face à l’érosion de la valeur des préférences commerciales dans le secteur bovin, le principal exportateur de bœuf namibien s’efforce de poursuivre sa stratégie de différenciation des produits basée sur la qualité, permettant de progresser substantiellement dans la chaîne de valeur. Cette stratégie comprend la commercialisation de morceaux individuels de viande de première qualité sous le label « Natures Reserve » vers des marchés spécifiques, en accord avec les exigences du distributeur final.

Elle a permis notamment à l’entreprise d’augmenter les prix moyens payés aux producteurs, malgré un déclin du volume de bétail abattu provenant des éleveurs commerciaux de bœuf. En interne, des initiatives ont été lancées pour accroître les ventes de bovins des troupeaux qui paissent sur les terres détenues collectivement, afin de maintenir le rendement des plans de transformation de la viande à des niveaux rentables (voir article Agritrade «  La stratégie de Meatco pour développer la filière », 2 décembre 2012).

Au début de l’année 2013, cependant, il est apparu évident que les développements dans l’application des exigences sanitaires et phytosanitaires (SPS) de l’UE allaient probablement réduire le volume du bétail à partir duquel des carcasses pouvaient être obtenues pour transformation et exportation vers l’UE. Les dispositions d’une nouvelle directive namibienne conçue pour donner effet à un règlement européen modifié en 2011 exigent maintenant que le bétail ait été retenu au sud de la barrière de contrôle vétérinaire namibienne pendant 90 jours avant l’abattage et ait été maintenu séparé du bétail non conforme aux normes européennes pendant 40 jours avant l’abattage.

Ces nouvelles exigences sont considérées comme « simplement impossibles » à respecter pour les éleveurs de la zone communautaire, puisque ces derniers ne peuvent pas se permettre d’élever, de commercialiser et de transporter le bétail conforme aux normes de l’UE séparément du bétail qui ne respecte pas ces normes (voir article Agritrade «  Les implications commerciales des exigences SPS de l’UE entravent le dév... », 4 mai 2013).

L’impact de ces nouvelles règles européennes va être de réduire le volume de bétail à partir duquel des morceaux de bœuf de haute qualité peuvent être tirés pour exportation vers l’UE. Alors que le gouvernement namibien semblerait vouloir approcher la CE « pour exempter certaines parties du pays de l’exigence de résidence pendant 40 jours », les développements du début de l’année 2013 montrent comment des modifications dans l’application des exigences SPS peuvent affaiblir la base de production sur laquelle le développement de produits différenciés par la qualité a été fondé.

Les exportateurs jamaïcains de café de première qualité rencontrent aussi des problèmes. Suite à la récession soutenue au Japon, les producteurs de café Blue Mountain ont été amenés à chercher de nouveaux marchés afin de maintenir les primes sur les prix dont bénéficie le café Blue Mountain. Dans ce cadre, les marchés des États-Unis, du Royaume-Uni et de la Chine ont été visés. Alors que le café a remporté des succès aux États-Unis (voir article Agritrade «  Le soutien des entreprises à la production durable de café de première q... », 30 avril 2012) et au Royaume-Uni (voir article Agritrade «  Le café jamaïcain Blue Mountain perce le marché britannique avec le cont... », 24 juin 2012), en décembre 2012, il a été annoncé que l’accord conclu avec la société d’importation chinoise allait prendre fin, de nouveaux partenaires commerciaux devant être trouvés.

Selon des informations de presse, des problèmes se sont posés en lien avec la protection sous une marque commerciale, certaines pratiques introduites ayant altéré la qualité des produits commercialisés sous les labels Jamaican Blue Mountain et High Mountain Supreme. Cette expérience montre les difficultés rencontrées pour maintenir une stratégie de différenciation des produits par la qualité sur les marchés où l’application réglementaire des normes et des labels de qualité n’est pas toujours respectée. 

3. Implications pour les pays ACP

3.1       Prendre en considération la concurrence accrue découlant des ALE conclus par l’UE

Les nouveaux ALE conclus par l’UE amplifient la concurrence sur les marchés spécifiques ciblés par les exportations ACP de produits différenciés (par ex. les exportations de bananes issues de l’agriculture biologique de République dominicaine). L’identification des pays et produits pour lesquels la concurrence va s’accentuer nécessite une analyse des exportations actuelles, des investissements prévus et des dispositions tarifaires des nouveaux accords. Là où la concurrence devrait avoir un effet sur les prix reçus, il pourrait s’avérer nécessaire de modifier les stratégies de différenciation des produits. Des options pourraient alors être la négociation d’accords d’équivalence (en tenant compte des coûts associés à la mise à niveau des systèmes de certification et de contrôle en accord avec les normes européennes), les doubles certifications ou la diversification vers d’autres marchés.

3.2       Veiller à rester informé sur les obligations administratives liées à la certification biologique

Les règlements plus stricts des agences de certification de l’agriculture biologique montrent l’importance pour les fournisseurs ACP de rester informés sur tous les aspects des évolutions réglementaires, puisque le non-respect des obligations administratives peut avoir autant d’impact sur le commerce que le non-respect des normes de production biologique. Il semblerait qu’il y ait un besoin de renforcer l’échange d’informations vers les producteurs ACP afin de garantir qu’aucun d’eux ne sera pris en faute du fait des évolutions de ces obligations.

L’intérêt croissant pour les produits locaux biologiques suggère également la nécessité pour les producteurs ACP de chercher à obtenir une double certification biologique et commerce équitable, afin de rester attrayants pour les consommateurs européens et être en mesure de bénéficier de primes sur les prix. Si l’on veut que le potentiel de l’Afrique en matière d’agriculture biologique soit pleinement exploité, les tendances de consommation dans les principaux marchés tels que celui de l’UE doivent être surveillées attentivement.

3.3       Participer à l’examen du cadre réglementaire de l’UE pour les produits issus de l’agriculture biologique

Dans une perspective ACP, les propositions provisoires de la CE concernant un cadre politique et juridique nouveau pour l’agriculture biologique pourraient prendre en considération des questions telles que :

  • répondre aux problèmes dans le cadre du régime d’importation de l’UE pour les produits biologiques, notamment les effets sur les marchés de l’introduction d’un nouveau logo européen pour l’agriculture biologique ;
  • les difficultés auxquelles font face les différents gouvernements ACP quand ils négocient des accords d’équivalence avec l’UE sur les normes en matière d’agriculture biologique ;
  • le champ d’action d’un programme pan-ACP de soutien aux négociations d’accord d’équivalence, conçu pour réduire les coûts administratifs à la charge des exportateurs ACP qui cherchent à desservir les marchés européens biologiques.

3.4       Renforcer les cadres politiques nationaux pour la différenciation des produits

Il semblerait nécessaire pour les gouvernements ACP d’élaborer des politiques plus claires et plus cohérentes de promotion des modes de production biologiques, des certifications commerce équitable et durabilité et des protections sous IG et marques commerciales. Dans certains cas (dans le cadre des systèmes de certification commerce équitable et durabilité), des systèmes de traçabilité pourraient être établis avec le soutien des pouvoirs publics. Cependant, l’importance relative à accorder à ces politiques dans les différents domaines devra être évaluée en fonction des coûts et des bénéfices relatifs au niveau de chaque pays.

Le partage des expériences au plan politique et opérationnel entre les pays ACP pourrait être bénéfique dans ces différents domaines, en particulier dans celui du fonctionnement des chaînes d’approvisionnement, afin que les primes sur les prix payées par les consommateurs bénéficient effectivement aux producteurs primaires.

3.5       Renforcer le fonctionnement des chaînes d’approvisionnement du commerce équitable ACP-UE

Les problèmes découlant du fonctionnement des mécanismes d’échange conventionnels, en plus de l’érosion des différentiels de prix entre les produits conventionnels et ceux du commerce équitable, suggèrent la nécessité d’efforts accrus pour renforcer la position des producteurs primaires au sein des chaînes d’approvisionnement du commerce équitable, particulièrement en ce qui concerne la négociation des prix. Le mouvement du commerce équitable accorde de plus en plus d’importance à cette question.

Par ailleurs, les plaintes des organisations de producteurs européens concernant des abus de position dominante commis par plusieurs distributeurs cadrent mal avec le rôle croissant pris par les supermarchés dans le développement des ventes du commerce équitable.

L’extension aux fournisseurs étrangers du code de bonnes pratiques proposé par la CE et régissant les relations entre les distributeurs et leurs fournisseurs – qui comprend des dispositions spécifiques traitant du partage des revenus avec les producteurs primaires de produits équitables – pourrait être une solution pour maintenir les revenus des producteurs et l’intégrité des labels commerce équitable.

3.6       Se préparer à l’application généralisée des normes de durabilité

Si les chaînes d’approvisionnement venaient à se mettre en conformité avec les normes de certification durable, une réponse concertée des décideurs politiques ACP semblerait nécessaire, et ce à deux niveaux principaux. En premier lieu, il conviendrait de soutenir les organisations de producteurs ACP pour qu’elles s’engagent dans des initiatives visant à améliorer la durabilité du commerce, afin que les questions liées à la durabilité économique soient traitées correctement. Ensuite, les gouvernements devraient soutenir financièrement les producteurs ACP afin qu’ils puissent mieux desservir les segments de marché certifiés durables dans l’UE.

3.7       Garantir une « ouverture » dans les systèmes nationaux de certification de la durabilité

Si l’utilisation de systèmes nationaux d’étiquetage de la durabilité se généralise dans l’UE (tels que le système « Origin Green » irlandais), alors les gouvernements ACP devront s’assurer que de tels systèmes d’étiquetage sont ouverts à tous les producteurs qui satisfont aux normes exigées, indépendamment de leur pays d’origine. Toute restriction donnant l’accès aux seuls producteurs nationaux pourrait faire que les produits importés soient relégués aux segments de marché des produits de moindre qualité (et aux prix plus faibles).

3.8       Renforcer le cadre réglementaire européen concernant les allégations en matière d’éthique et de durabilité

Les discussions récentes en Nouvelle-Zélande sur l’auto-certification par Dole de ses bananes « Ethical Choice » témoignent de l’importance de disposer de cadres réglementaires clairs concernant les allégations en matière d’éthique, de protection de l’environnement ou de durabilité apposées sur les étiquettes par les industriels, afin que les consommateurs puissent faire des choix informés.

Une réglementation européenne plus large semblerait nécessaire afin de garantir que les consommateurs puissent juger correctement les allégations figurant sur les étiquettes, que ces dernières soient liées à des normes éthiques, des préoccupations environnementales, de durabilité ou sanitaires.

Principales sources

1.         International Federation of Organic Agriculture Movements (IFOAM), site Web

http://www.ifoam.org/en/node

2.         CE, DG Agriculture et développement rural, « Commission launches public consultation on the future of organic production », 15 janvier 2013

http://ec.europa.eu/agriculture/newsroom/101_en.htm

3.         IFOAM, « OSEA II project: Regional cooperation for organic standards and certification capacity in East Africa », page Web

http://classic.ifoam.org/partners/projects/osea.html

4.         Journal officiel de l’Union européenne, « Règlement d’exécution n° 508/2012 de la Commission […] portant modalités d’application […] en ce qui concerne le régime d’importation de produits biologiques en provenance de pays tiers », 21 juin 2012

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2012:162:0001...

5.         USDA, « The EU-US organic equivalence cooperation », GAIN Report n° NL2006, 15 février 2012

http://gain.fas.usda.gov/Recent%20GAIN%20Publications/The%20EU-U.S.%20Or...

Durabilité

6.         Green Palm Sustainability, « WWF assessment of RSPO member palm oil producers 2013 », 19 février 2013

http://www.greenpalm.org/en/blog-press/blog/wwf-assessment-of-rspo-membe...

7.         Commonwealth Secretariat, « Eco-labelling: Challenges and opportunities for small states and LDCs », par M. Haynes, Trade Hot Topics n° 95, 2012

http://www.thecommonwealth.org/document/181889/34293/227379/251358/trade...

8.         KPMG (commandité par l’ICCO), « Study on the costs, advantages and disadvantages of cocoa certification », octobre 2012

http://www.icco.org/about-us/international-cocoa-agreements/cat_view/30-...

9.         ICTSD, « Private voluntary standards: The instruments for a lasting trade policy in Africa? », Bridges Africa Review, volume 1, numéro 3, 4 juillet 2012

http://ictsd.org/i/news/bridges-africa-review/137484/

Commerce équitable

10.        Fairtrade International, « Monitoring the scope and benefits of Fairtrade: Fourth edition, 2012 », 2012

http://www.fairtrade.net/fileadmin/user_upload/content/2009/resources/20...

Indications géographiques

11.        CE, DG Agriculture et développement rural, « External study: Value of production of agricultural products and foodstuffs, wines, aromatised wines and spirits protected by a geographical indication (GI) », page Web avec des liens vers tous les aspects de l’évaluation, octobre 2012

http://ec.europa.eu/agriculture/external-studies/value-gi_en.htm

À propos de cette mise à jour

Cette note de synthèse a été mise à jour en septembre 2013 afin de prendre en compte les développements depuis juillet 2012. D’autres publications dans cette série et des ressources supplémentaires sur le commerce agricole et de la pêche ACP-UE peuvent être trouvées en ligne à http://agritrade.cta.int/fr.

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